Je vous le dis tout net au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, j’aime bien la bonne bouffe et j’apprécie le bon vin. Donc, quand arrive une occasion de boire un coup, il est rare que je l’esquive. Et, si je ne suis pas absolument une fan de beaujolais nouveau, je n’évite pas d’en boire en novembre.
Il y a quelques années, une de mes amies, et néanmoins consœur (contrairement à ce que j’ai pu lire ailleurs, ce terme existe, n’est pas un barbarisme et, dans ma profession, en s’en enorgueilli), m’avait incité à déguster chez elle un petit vin en compagnie de son créateur (du vin, pas de mon amie) qui était un de ses copains (à mon amie, pas au vin…).
Le midi même, un critique gastronomique de renom, qui écrivait en ces temps-là chez nous (des papiers assez approximatifs, il faut bien dire ce qui est, c’est pour cela que j’éviterai de publier son nom) a eu la gentillesse d’offrir le beaujolais nouveau à nous autres, tâcherons de la presse. Mais avant la dégustation, il a tenu à nous faire un petit discours (on est cabot ou on ne l’est pas) dans lequel il nous expliqua que ce vin n’était pas un pinard de négociant, comme 90 % de ce qu’on trouvait à Paris, mais un vrai produit du terroir qu’il avait ramené exprès pour nous.
Connaissant mon critique (à force de vérifier et corriger les infos de ses papiers, tout de même, on finit par savoir à qui on a affaire) et sachant ce qui m’attendait le soir-même, j’ai détourné une bouteille pour la faire tester par un gars du terroir, un vrai.
Le résultat m’a bien fait rire. Tout d’abord, la bouteille n’était pas une bouteille de beaujolais. C’est comme cela que j’ai appris qu’à chaque terroir correspondait une bouteille d’aspect particulier. Cette différence de contenant, mine de rien, prouvait qu’il s’agissait bien d’un picrate de négociant. Ce qui fut corroboré par le fait que, s’il y avait bien du vin nouveau, il y avait aussi du vin vieux de l’année précédente. Eh bien voilà, mon critique n’avait plus qu’à aller se rhabiller. Comme quoi, avec un joli discours, on peut faire avaler n’importe quoi à n’importer qui. Cela dit, le résultat n’était pas affreux. C’était même buvable, mais ce n’était pas ce qu’on nous avait vendu : un vrai beaujolais nouveau du terroir.
Depuis, le vigneron est devenu mon ami. Et deux fois par an, quand il monte à Paris – dont une fois en novembre –, je lui commande force bouteilles. Pas pour moi, enfin pas que. Il faut bien avouer que lorsqu’on goûte son beaujolais nouveau, on comprend pourquoi, il y a très longtemps, on s’est pris de folie pour ce petit vin-là. Moi qui n’en bois jamais au restaurant, jamais dans les bistrots (que du vin de négociant), qui n’en achète jamais… chez lui, je m’en délecte volontiers.
Le reste de l’année, mon ami vigneron nous régale d’un morgon fort bon, d’un beaujolais village absolument exquis et même d’un beaujolais rosé des plus agréable. Pour mes beaux yeux, il consent même à aller quérir, chez son voisin, quelques bouteilles de beaujolais blanc à tomber par terre, pas d’ivresse, non, de pur bonheur.
Voilà, les temps sont proches, il va revenir, je vais crever ma bourse et acheter quelques bouteilles de ce divin nectar.
Cela dit, je peux augmenter le cercle des adorateurs de Bruno Jambon (si si, c’est son nom…). S’il y a des parisiens intéressés, ils peuvent toujours me mailer, mais rapidement. Il faut que je passe commande avant le 15. Je leur enverrai les conditions, les tarifs, etc.
L’abus d’alcool étant dangereux pour la santé, je vous conseille de consommer avec modération.
« Quant au mois de mars, je le dis sans aucune arrière-pensée politique, ça m’étonnerait qu’il passe l’hiver » (Desproges, évidemment).