Promenons-nous, oui… mais non
Il fait moche, il fait beau, il fait doux. Le cul sur mon fauteuil de bureau, je regarde par la fenêtre. Il pleut, je retourne à mes occupations. Il fait beau, je me dis que ce serait bien que j’aille me promener. Et je retourne à mes occupations. Mais avec un fond de culpabilité.
Tout le monde me dit (moi-même aussi) qu’il faut que je bouge mon corps. Pour ma santé, pour mon bien-être. Mais j’entretiens des relations mi figue mi raisin avec la promenade. J’adore me balader. ce n’est pas le problème : en ville, dans les champs, en bord de Loire. Mais pour ce faire, je dois prendre ma voiture. Ça me gave un peu. Suffisamment pour que je ne bouge pas.
Le seul endroit où je pourrais me promener juste en sortant de chez moi, c’est à Saint-Pierre-des-Corps centre. Et franchement, ça ne fait pas envie. SPDC est l’archétype de la petite ville qui n’a, architecturalement parlant, que peu d’intérêt. Même si on y vit très bien. C’est une cité ouvrière, quasiment entièrement détruite pendant la dernière guerre mondiale (nœud ferroviaire abondamment bombardé). Un des rares monuments qui a survécu, c’est la mairie. Nous avons une belle mairie construite au tout début du XXe siècle.
La mairie a allumé les lumières de noël aujourd’hui, en fin d’après-midi
Un peu plus loin, le bâtiment le plus ancien dans le quartier, c’est l’église de la médaille miraculeuse. C’est une de ces petites églises toutes moches construites lors de la deuxième partie du 19e siècle. Tout le reste date des années cinquante à nos jours. Et franchement, en dehors de la bibliothèque, ce sont les constructions les plus récentes qui sont les moins moches.
Les rues sont toutes droites avec, la plupart du temps, des trottoirs étroits et cabossés. Elles sont bordées de pavillons, de petits immeubles, de grands immeubles, sans aucun charme. Il n’y a pas non plus vraiment de rue commerçante.
Sur la place en face de la mairie, le centre commercial a fermé il y a un mois. Les boutiques autour font grise mine. Quelques unes sont vides. Un coiffeur, une boulangerie, un petit établissement de restauration rapide (pas mauvais, des produits faits maison), un marchand de journaux, un notaire, un magasin africain, un institut de beauté qui fleure bon les années cinquante et au moins trois banques. Les commerçants sont tous charmants et agréables. Mais ça n’en fait pas un but de promenade. Heureusement, il y a le marché deux fois par semaine.
Un tout petit peu plus loin, une librairie. Mais c’est THE librairie, avec une libraire au top : chaleureuse, sympathique, qui a la foi dans ce quelle fait. Mais je ne vais pas aller me promener chez elle. Je suis incapable d’en sortir sans un ouvrage. L’Oiseau vigie propose aussi des boissons chaudes, deux petites tables en extérieur et des soirées discussion autour de livres, d’auteurs,
Au bout, vers l’est, il y a les ateliers de la Morinerie, une ancienne friche industrielle transformée en ateliers (70) d’arts plastiques, d’arts du spectacle, d’artisanat d’art… Et juste après, les pépinières de la ville. C’est sympa à faire. Mais à pied, c’est loin et, pour y arriver, il faut traverser des rues et des rues mornes bordées de pavillon ou de no man’s land.
C’est le même problème si je veux rejoindre la Loire. Et si jamais l’envie me prend, il n’y a pas d’accès au fleuve. Pour rejoindre les berges, il faut faire un détour jusqu’à la frontière entre Saint-Pierre et Tours ou faire 2 ou 3 kilomètres le long d’une route très passante et franchement pas un lieu pour marcher. Idem, si je veux rejoindre la piste cyclable, je dois d’abord aller vers Tours.
Saint-Pierre des Corps sur Loire. On dit que la ville tourne le dos au fleuve.
Entre chez moi et Tours, il y a un entrelacs de rues avec des petits squares, des plantations, des passages entre les jardins. Ce n’est pas désagréable aux beaux jours. Mais ce n’est pas un but de promenade.
Evidemment, si je prends la voiture, je peux aller dans le vieux Tours, je peux aller dans les vignes, je peux aller sur les bords de Loire, sur les bords de Cher.
Cela dit, j’ai un problème avec l’idée même de la promenade comme j’ai un problème avec tout ce qui ressemble de près ou de loin à une obligation. Il fait beau : il faut se promener. L’idée même me hérisse. Ça me vient de mon enfance.
Quand nous habitions en Charente, ma mère nous foutait dehors pour que nous prenions l’air (alors que j’étais tellement bien dans mon coin avec mon livre). Et le dimanche après midi, c’était promenade en famille. Je trouvais qu’il n’y avait rien de pire que ces promenades en famille où je m’ennuyais à 100 sous de l’heure. La semaine, avec mes sœurs ou toute seule, je partais volontiers à l’aventure. Mais la promenade en famille après le déjeuner… Non. Rien que le mot « promenade », aujourd’hui encore, me crispe.
Un jour je raconterai les relations entre Tours et Saint-Pierre-des-Corps…
Ceci est ma participation au calendrier En Avent les blogopotes, une idée d’Anne, du blogallet : faire un post sur un thème qu’elle donne et qui change tous les jours.. Aujourd’hui, c’était Question
Oui, St Pierre des Corps… Je comprends. Même si j’aime beaucoup déambuler en ville, parfois.
Une promenade, une fois l’élan donné, doit être une respiration, pas une obligation.
Moi aussi, j’aime bien déambuler en ville, mais pas dans ma ville. Mais devoir prendre ma voiture pour aller me promener me tue. J’ai trop pris l’habitude, quand je vivais à Paris, de sortir de chez moi et de partir direct à l’aventure. Tu as raison en tout cas, la promenade doit être sans contrainte, une liberté
Une bonne amie à moi a habité (et habite sans doute encore) Saint-Pierre des Corps… Quant à la promenade du dimanche, n’est-elle pas, elle aussi, d’une autre époque?
J’espère ne pas avoir donné une trop mauvaise image de cette ville. Elle n’est pas très jolie c’est vrai, mais ce n’est pas de sa faute et on y vit pas mal. Elle peut même être assez attachante. A l’image de ma libraire.
J’aime bien tes photos, elles poétisent l’ordinaire urbain.
Et comme je te comprends, moi non plus je n’arrive pas à me bouger pour me promener dans mon quartier, ou même aller au centre-ville.
Je me demande si ce n’est pas propre aux banlieues. Ici le centre ville est mort. C’est d’ailleurs une des préoccupation du maire si j’en crois son dernier courrier. Que ce soit en plein été en plein cagnard ou durant l’hiver sous la pluie, quand il faut traverser cette place quasi déserte, ça ne donne pas envie de flâner.