Léone court dans le jardin, parmi les buis. Elle suit les chemins, passe d’une aile l’autre. Je la suis un moment et prend quelque remplages en photos. Leurs motifs sont tous différents, dessins d’étoffes broderies, motifs végétaux… un travail d’une infinie patience. Au-dessus on aperçoit un clocher (dit de la cigogne…), la galerie supérieures et les extensions qui ne semblent pas ouverts aux public.
Nous quittons le cloître pour nous rendre dans les capellas imperfeitas, les chapelles inachevées. Elles ont été commandées par Duarte, fils de Joao Ier, pour y recevoir son tombeau et je comprends pourquoi il était absent de la chapelle du fondateur. Et son gisant est là, donnant la main à son épouse.
Quand il meurt, deux ans après le début des travaux, le bâtiment s’élevait jusqu’à la naissance des sept chapelles gothiques. L’ouvrage fut relancé par Manuel Ier. C’est lui qui fit construire la porte monumentale (15 mètres de haut), tout en dentelle de pierre chère au style manuelin. On l’aura compris, ce style porte le nom de ce roi sous le règne duquel il connut son apogée. Lou est totalement fascinée par le travail de la pierre. Elle imagine les heures qu’il a fallu pour réaliser cette guipure.
Manuel Ier fit également terminer les chapelles. Au pied de chaque angle, de toutes petites têtes ont été sculptées que je m’amuse à photographier. Léone, elle, ce sont les vitraux qu’elle a remarqués. Je crois qu’elle les a tous pris en photo.
Au dessus des voutes des chapelles, d’énormes piliers se lancent vers le ciel, formés de faisceaux de colonnettes, cerclées de bandes et de couronnes de végétation. C’est manuelin en diable, très chargé. Certains adorent, je préfère l’époque précédente. Mais à bien observer, je ne peux m’empêcher de songer au palais de Grenade, à ses stucs magnifiques. C’est de cet art de la pierre que s’inspire l’architecture portugaise de l’époque.
Chassés, combattus, les musulmans ont cependant laissé bien des trésors dans ces terres et ont imprimé durablement leur marque. La plus belle, celle de l’art et de la beauté.
Rien n’est jamais venu couvrir les moignons des chapelles qui restent depuis lors à ciel ouvert, et c’est ce qui les rend à jamais uniques.
En repassant le portail, je remarque une inscription qui se répète à l’envie : « Leauté Faray ta yaseray. » « Tant que je serai », traduit le guide. Une véritable obsession.
En attendant, Nous revenons à des choses plus prosaïques. Garance a envie d’aller au toilettes. Léone en a marre. Lou débute un léger mal de tête. Et moi, tout cela à la fois. Il est temps de repartir. Et de faire des courses. Mais c’est un décor gothique (de carton pâte toutefois) qui nous accueille dans le supermarché. Nous sommes poursuivis… Choisir son steak ou sa côtelette d’agneau sous des ogives ou des fenêtres à meneaux, ça vous pose sa cliente !
Quand on n’a pas de toboggan, autant en improviser un…
Le coffre plein, nous partons vers la maison. Sur l’autoroute, nous voyons les ravages d’une récent incendie. D’un côté les arbres sont noirs, de l’autre, tout blanc (on a versé dessus des produits censé les protéger du feu, et cela a l’air de fonctionner). Le paysage est fantomatique.
Un peu plus loin, un accident. L’auto est sur le toit, de la caravane, il ne reste que des miettes. Je demande aux filles de regarder de l’autre côté. Je ne tiens pas à ce qu’elles aperçoivent des blessés au cas où ils seraient encore là.
Nous arrivons enfin. Je m’écroule sous mon lit. L’art m’épuise. Quand je tente de mettre mes photos sur mon ipod, je me rends compte que le boîtier qui me sert à lire les cartes ne fonctionne que par intermittence. Les piles sont HS. Les photos se transfèrent cinquante par cinquante, puis vingt par vingt, puis… Pour moi, ce n’est pas très grave, j’ai le cordon qui me permet de tout sauvegarder sur l’ordi de ma mère, puis de là sur le ipod. Mais je n’ai pas le cordon de l’appareil de Lou.
J’utilise le peu de piles qui me reste pour vider sa carte en priorité. Elle a pris quelque 200 clichés et surtout elle n’a pas jeté celles qu’elle n’a pas l’intention de garder. Je passe une heure à faire le transfert. L’appareil traite les première photos, je les passe du ipod à l’ordi, je remets la carte dans l’appareil, j’efface les images déjà transférées et je recommence pour les suivantes. En râlant comme un putois.
Le Nôm et moi lors d’une pause dans le monastère…
Pour m’assister, le Nôm me sert un porto et des amuse-gueule (chorizo). Puis prépare le dîner. Les mousmés sont parties courir la campagne. C’est l’heure à laquelle le village se réveille. Des maisons endormies par la chaleur, qui semblaient sans vie, sortent des femmes, des enfants qui commencent à marcher le long des rues en devisant. L’éclairage des villages est en général puissant car c’est dans la rue, à la nuit tombée, que naît le voisinage. Le jour nous avons l’impression d’être seuls au monde. La nuit, il en va tout autrement.
De Muge, la petite ville voisine qui fête son saint patron, nous viennent le bruit des flonflons, des pétards. Les filles aimeraient bien y aller voir de plus près. Mais elle ne posent même pas la question. Elles sont trop fatiguées et filent au lit. La bataille les a mises KO.
Si vous souhaitez voir les photos en plus grand et en regarder de nombreuses autres, il suffit de cliquer sur l’une d’entre elles ou de vous rendre dans mon dossier photo sur le Portugal ou sur nos vacances…






