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Nous sommes partis à un peu plus de 6 heures. Le jour se levait à peine, il faisait frais, le ciel était couvert. Les conditions idéales pour rouler. La feuille de route sur les genoux, j’essaie de m’orienter dans les dédales de l’autoroute. Raté, j’ai repris la route de Paris. Il ne reste plus qu’à faire demi-tour pour repartir dans le bon sens. La jauge essence couine, mais j’ai décidé de faire le plein en Espagne. Et je fais bien. Le diesel est nettement moins cher. Nous traversons le pays Basque, passons au large des grandes villes : Saint-Sebastien, Donostia, Bilbao. Lou me dit :
– il y a une ville qui revient souvent : zerbitzubidoa.
– C’est la traduction basque de aera de servicio mon cœur, soit aire de service.

Nous tombons dans les embouteillages. Normal, nous contournons une grande ville au moment de l’embauche. Mais il n’y a rien de dramatique. La montagne est belle, quand elle n’est pas défigurée par les industries. Les maisons basques accrochées aux prairies vertes disparaissent parfois derrière les voiles de brume qui drapent encore les hauteurs. J’essaie de régaler mes yeux tout en conduisant, pas facile. Je ne peux voler que quelques images. Ça me frustre, mais c’est à chaque fois comme cela. Le Nôm ne conduisant pas, je suis rivée au volant. Nous passons en Navarre, puis en Biscaye.

Les derniers contreforts des Pyrénées s’adoucissent en plaines à blé. Nous ne sommes pas loin de Burgos. C’est là que nous prenons notre petit-déjeuner. L’aire de repos est réduite à sa plus simple expression : trois bancs et rien d’autre : pas même de toilette. Il faut descendre le bord escarpé d’un champ pour espérer se cacher des automobilistes qui courent. Nous repartons, je suis en meilleure forme. Une demi-heure de pause, il n’y a rien de tel.

La Castille nous regarde passer. Elle est blonde sans aucun doute. La terre, les chaumes des blés récemment fauchés, quelques champs de tournesol, tout est jaune. Pas d’arbre, pas de pré à l’abandon. Même les herbes séchées du bord de la route sont couleur paille.

Valladolid, Salamanque… les kilomètres défilent. Il faut dire que je respecte assez peu la limitation de 120 Km/heures, sauf lors des zones surveillées par les radars. Je fais comme tout le monde sur la route. A Salamanque, nous cherchons une aire pour déjeuner. Nous en avons bien vu une juste avant la ville, mais les trois table en pierre blanches n’étaient abritées par aucun arbre. Il fait plus de 35 dehors. Je ne tiens pas à attraper une insolation. Le problème, c’est qu’ensuite, les kilomètres se suivent et se ressemblent sans aucune aire de repos.

Les stations services ne sont pas équipées. Il y a juste un parking et un restaurant. Je comprends bien la méthode, mais nous avons tout ce qu’il faut pour déjeuner et je ne veux pas perdre deux heures à manger. En plus, si je mange trop, après j’ai tendance à somnoler ce qui est très mauvais pour l’après-midi qui m’attend. Et puis, enfin, le panneau signalant l’aire de repos. Nous nous arrêtons. C’est la désolation. De l’herbe sèche, des peupliers d’Italie rachitiques, pas un banc, évidemment, là non plus il n’y a pas de toilettes. Je sors des serviettes de plage que j’étends au sol. Nous nous asseyons en essayant de nous protéger du soleil. C’est peu dire que nous avalons à toute allure notre melon et nos sandwichs au jambon de Bayonne. Trente minutes après nous fuyons ces lieux inhospitaliers.

Nous arrivons au Portugal. J’hésite à reprendre de l’essence. J’aurais dû. Deux cents kilomètres plus loin, je me rendrai compte que le carburant, ici, c’est quasi au même prix qu’en France. Les stations sont nettement plus accueillantes. Il y a des coins pour pique niquer. Des toilettes. Des petites boutiques et des gens charmants. Nous repartons. Il nous reste encore environ deux cents kilomètres à faire, sur 950. Je tiens le bon bout, mais j’en ai ma claque. Nous traversons des kilomètres de forêts calcinées. Un vrai désastre. Beaucoup de plantations ont été faites pour lutter contre le déboisement lié aux feux, on sent que le pays s’est mobilisé pour effacer cette vilaine cicatrice, mais il est saigné.

Le dernier tronçon d’autoroute est payant. Ce sera le seul et il est en travaux. Nous roulons à deux à l’heure. Je fais remarquer en riant au Nôm qu’en Espagne ou au Portugal, on ne payait que les autoroutes en travaux. C’était un concept tout à fait intéressant. Santarem s’annonce enfin, il ne nous reste qu’une vingtaine de kilomètres. Nous passons Benfica do Ribateijo, puis Muge et enfin, nous arrivons à Granho.

Avant d’arriver dans un nouvel endroit, j’essaie toujours de m’imaginer comment cela va se passer. Là, je me suis vue demander mon chemin, essayer de trouver la rue, la maison, m’adresser à des gens qui ne comprennent pas le français, trouver une maison déjà occupée. Bref, je me passe tous les scénarios imaginables, de préférence les plus tordus et improbables… Evidemment, ils ne se produisent jamais. Mais les vraies histoires, que je n’ai pas osé imaginer, n’ont rien à envier à mes fariboles.

Fin de journée à Granho

En fait, la rue du 25 avril 1975 est celle par laquelle nous arrivons. Et vu comment est constitué le village, c’est très étonnant. Si nous étions arrivés par une autre entrée, nous aurions pu tourner un bon bout de temps avant de trouver. Mais là, en deux minutes, nous sommes devant la maison. C’est une petite baraque de brique au crépi blanc et bleu qui lui donne un air de maison de vacances.

Nous garons la voiture sous l’auvent visiblement fabriqué à cet effet. Nous descendons. Tout est désert. Il n’y a que le vent qui souffle, fort. Toutes les autres maisons tournent le dos au vent, sauf la nôtre.Ce qui n’est pas plus mal car nous avons de l’air tout le temps. Pour le moment, il faut essayer d’entrer dans la maison. Nous cherchons la clé. Sur une des portes, je trouve un petit mot : « La clé est sous la lampe de la terr… » On dirait que ce sont les derniers mots de la récente victime d’un assassin, mais dans l’histoire, ce n’est sans doute que le stylo qui a rendu l’âme.

Je conclus qu’il doit s’agir de la terrasse. Mais je n’en suis pas sûre. Nous retournons tout, je démonte même les deux néons. Rien. Je ne pensais pas que nous commencerions notre séjour par une course au trésor. C’est amusant. Je finis tout de même par appeler le propriétaire en Belgique. En fait, la clé se trouve… dans une bonne cachette. J’aperçois alors sa petite pointe qui dépasse. Nous voilà dans nos murs. Maria, la mère du propriétaire, arrive sur ces entrefaites. C’est une femme joviale et gentille qui nous fait faire le tour du propriétaire, puis nous laisse nous installer.

Ça y est, nous y sommes dans notre maison de poupées. Les filles qui faisaient la moue au départ finissent par s’approprier les lieux et en raffoler. Il ne nous reste qu’à y vivre une quinzaine de jours…

 

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1. Le vendredi 25 août 2006, 14:49 par Anitta

Eh ben dis donc, de Biarritz à la maison de poupées, tous ces kilomètres sans presque s’arrêter, quel courage ! Je savais pas, pour l’essence au Portugal, j’ai même tendance à trouver ça curieux. En tout cas, j’attends la suite, histoire de savoir si tu as pu faire reposer ton dos en marmelade durant cette première nuit (suspense insoutenable) !

2. Le vendredi 25 août 2006, 16:51 par samantdi

Tu es endurante, Akynou ! j’ai fait le même trajet, mais nous étions deux à conduire, et j’avais trouvé long et fatiguant, alors toute seule … chapeau !

Je vais aller zyeuter les photos, j’aime toujours autant tes reportages, on s’y croirait : quel sens du détail !

3. Le vendredi 25 août 2006, 17:19 par Akynou

Je vais vous dire : j’ai trouvé ça… très très long et j’étais bien contente d’arriver. Je crois que 900 et quelques kilomètres est ma limite… Quand je pense qu’il y en a qui font ça d’une traite, je ne pourrai jamais… (et puis j’avais de la bonne musique aussi, ça aide).
Pour le sens du détail, c’est sans doute parce que j’ai une bonne mémoire et que je prends des notes :-)
Les photos, j’en ai tellement, que je n’en mets qu’une partie, les plus parlantes. Mais il y en aura sans doute tout au long de l’année. Je n’ai même pas encore mis la moitié de mes photos de Guadeloupe de février. je suis folle avec ça…

4. Le vendredi 25 août 2006, 22:35 par Wachya

Merci merci merci
J’ai recu ta carte postale
avec la magnifique cuisine…
bisou milles fois…
Tu as mis du soleil dans ma journée!

5. Le vendredi 25 août 2006, 23:17 par Mamounia

900km,y’a rien là, ici on ne change même pas de province quand on fait cà :-)) Ok, ok, j’arrête de crâner, je trouve cà horriblement long moi aussi mais je l’ai déjà fait plusieurs fois d’une traite, dont la semaine dernière…

6. Le vendredi 25 août 2006, 23:21 par Akynou/racontars

wachya : bien contente de te voir par ici. Je t’embrasse et je suis contente que tu ai reçu ma carte :-)
mamounia : moi auss je l’ai fait d’une traite. L’an passé, j’ai fait Paris Nice d’une traite et ça fait un peu plus de 1000 kilomètres. Mais j’en avais déjà 800 derrière moi (Paris-Anglet), puis je suis toute seule à conduire. Et j’aime pas ça en plus. Et en plus, j’étais crevée… Alors, j’ai vraiment trouvé le temps long.

7. Le samedi 26 août 2006, 00:37 par Lou:)

Tiens le mot de Lou sur toutes les villes appelées zerbitzubidoa me rappelle une anecdote de bien loin. Ici au Québec, avant la loi 101, tout l’affichage était bilingue anglais/français et lorsque nous sortions nous promener nous nous demandions bien pourquoi il y avait tant de ponts qui s’appelaient « Bridge »…

Bises!

8. Le samedi 26 août 2006, 11:12 par Bra

Que de kilomètres !!!

9. Le jeudi 31 août 2006, 00:12 par Fauvette

Et les filles durant tous ces kms cela allait ? Elles jouaient et dormaient et chantaient, et recommençaient ?
Bravo pour l’endurance.

10. Le jeudi 31 août 2006, 00:43 par Akynou/racontars

Un peu de tout ça oui… Pas assez de dodo cependant… Il faudrait que je leur fasse faire le marathon avant de partir :-)

11. Le samedi 23 septembre 2006, 22:15 par Maria

Bonjour les filles :o) comment cava???? madame ma sœur a bien trouvé la clé dans la boite aux lettres merci .On se reverra j’espère Bonjour a tous Maria

12. Le samedi 23 septembre 2006, 22:40 par Akynou/racontars

Maria ! Tu nous as retrouvé :-) Les filles vont être contentes. Elles me parlent souvent de toi. Nous espérons que tu vas bien. J’ai pris plein de photos des fleurs de la maison pour te les donner (mais j’ai pas eu le temps). J’espère bien sur qu’on se reverra. :-)

13. Le samedi 23 septembre 2006, 22:55 par Maria

AU fait c’est ma nièce que est tombée sur votre Blog et que me l’a envoyée, et je suis contente, Pierre est encore a Paris..Embrassée bien les filles pour moi a bientôt Maria