Arrivée dans l’appartement, je pose mon sac et commence à préparer les sacs à dos de Garance et de A., sa copine. Elles emporteront là-dedans quelques livres, leur pique-nique, leur petit-déjeuner. Heureusement que j’ai demandé au Nôm de préparer les sandwichs hier soir, je n’aurais pas vraiment eu le temps de le faire ce matin. Je réveille les deux mousmés qui dorment emmêlées l’une à l’autre dans le grand lit de Lou, avec la chaleur qu’il fait… Les enfants, quand ils sommeillent ensemble aiment à se rassurer en se rapprochant.
Léone est dans son lit, une fois n’est pas coutume, elle se retourne et marmonne dans son sommeil. Les deux grandes se faufilent dans le salon pour s’habiller. Dix minutes plus tard, nous sommes prêtes à partir. Je décide de prendre le métro plutôt que d’appeler un taxi. Le trajet est direct et si les deux sacs sont un peu lourds, ils sont quand même portables. Dans la rame, Garance me tient la main. Nous nous regardons de temps en temps, avec un sourire.
Arrivées à destination, il nous faut nous enquiller les kilomètres de couloirs, le tapis roulant ne fonctionne pas, grrrr. Je m’étonne d’être encore aussi fraîche. Dans la gare, il faut encore longer les quais pour arriver au hall Pasteur, installé au-dessus des voies. Les sacs commencent à se faire lourds au bout de mes bras. J’enregistre les filles. Commence une autre attente. C’est amusant de voir arriver les autres parents et leurs enfants, de les observer. Au moins, cela occupe.
Ainsi, cette femme avec son fils, qui tient absolument à placer au moniteur qu’il y a dans le dossier une lettre pour le directeur, que ce n’est rien du tout, juste pour dire que son fils est ultrasensible, à fleur de peau. Elle-même a l’air si angoissée que je ne donne pas cher des nerfs du gamin au moment du départ. Une famille arrive, la mère et la fille (environ 7 ans) tirent de lourdes valises, suivies par le père et le flls (dans les 11 ans), les mains dans les poches. C’est forcément quelque chose que je remarque. Comme j’ai noté avec amusement que la femme, et la petite d’ailleurs, était toute de rose vêtue et que les hommes étaient habillés de bleus de pied en cap. Peut-être juste une coïncidence, mais elle est troublante.
Deux mères arrivent avec leurs garçons. Leur façon de vouloir passer devant tout le monde, de parler à leur progéniture comme s’ils étaient des dieux vivants me rappelle certaines caricatures de mères méditerranéennes. « Il est beau mon fils, non ? Hein, qu’il est beau mon fils… » J’ai des amies qui disent cela en rigolant. Ce n’est pas le genre de ces deux-là.
Un premier groupe part vers le train. Celui-ci est immense et bien sûr, le wagon de nos enfants est en tête. Encore de la marche, je porte toujours les sacs. Mais je suis la première à monter dans le train. ’J’ai donc toute la place que je veux pour me débarrasser – enfin ! raaaaa, c’est bon – des bagages. Je redescends et rejoins Garance et sa camarade sur le quai. Je glisse quelques mots gentils à la seconde. J’ai quelques scrupules à faire de gros câlins à Garance devant elle, dont la maman n’est pas là, mais avec mon autre fille… Mais bon, ma fille, c’est ma file, c’est même ma Garance chérie d’amour, elle est belle ma fille, hein ?…
Je la serre dans mes bras, lui colle de gros bécots sur les joues. Elle me les rend en riant « Maman, tu m’étouffes. »
Les enfants montent dans le train. Nous sommes censés attendre le départ du train, au cas où… La maman angoissée se désole de voir son fils pleurer à chaudes larmes, mais elle a tout fait pour. Une autre se retient à grand peine. Du coup, fiston craque aussi. Moi, je fais le clown, bien relayée par Garance. Son amie se gondole. Nous formons un drôle de trio, joyeux, au milieu d’un océan de tristesse. J’ai aussi la gorge serrée, mais je ne connais pas de meilleur dérivatif que le concours de grimaces que je gagne à coup sûr…
Autour de nous, certains commencent à sourire, puis à rire franchement. Mais, putain, il va partir ce train, parce que j’en ai assez de donner le change. Je suis fatiguée et je sens que Garance, la vaillante, commence à fléchir aussi. Enfin, le convoi s’ébranle. Une femme se met à courir en laissant sa main sur la vitre. Elle se fait vertement engueuler par le chef de gare qui lui crie qu’elle risque de se faire happer. Elle ne l’entend pas. Le train ralentit, puis s’arrête.Damned, qu’est-ce qui se passe encore. Les mères (et les pères) se regardent, ne sachant que faire, partir ou rester.
Finalement, nous restons, mais nous ne nous approchons pas du wagon, inutile de remettre le couvert de l’émotion. Au bout d’un quart d’heure, les portes s’ouvrent. Descendent de la voiture les deux méditerranéennes qui détalent comme des lapines. Elles étaient montées dans le train en dépit des consignes pour installer leurs précieuses progénitures et avaient oublié de descendre avant le départ. Le contrôleur, furieux, a voulu leur dresser un procès-verbal : 150 euros chacune. D’où leur course pour échapper à l’amende.
Le tain, lui, est reparti, avec une demi-heure de retard. Les mères s’égaient. Je me dirige vers la buvette pour grignoter un croissant et boire un café. La fatigue commence à me tomber dessus.
J’ai donné rendez-vous au Nôm à la sorte du métro, à l’entrée de la gare. Léone partant à 9h15, il doit arriver entre 8h15 et 8h30. Il n’est que 7h30. J’aurais pu emmener Léone avec moi, mais outre qu’il me semblait injuste de la sortir du lit à 5 heures du matin, je me voyais mal me trimballer trois bagages et trois gamines mal réveillées. Supernana, d’accord, mais j’ai des limites…
J’ai presque une heure à tuer avant l’arrivée du ère et de la fille. Que faire… Je descend lentement vers le lieu de rendez-vous. Mais je constate, une fois en vas, qu’il n’y a rien pour s’asseoir. J’ai les chevilles qui me rentrent dans les tibias, les tibias dans les genoux, les genoux dans les cuisses, etc. Bref, je me tasse et ça commence à faire mal.
Heureusement pour moi, près du kiosque à journaux, traîne un chariot. Je le regarde, et plus je le regarde, plus je me dis qu’il est mon sauveur, ma solution. Mais il me faut bien un quart d’heure pour me décider. Finalement, je pose mes fesses dessus et je vois que cela est bon. Formidable même. Jamais je n’aurais imaginé qu’un chariot puisse être aussi confortable.
Pendant les trois quarts d’heures qui suivent, j’observe la foule qui apparaît derrière les portes du métro. C’est comme un grand spectacle de marionnettes. Je vois des pieds, rarement des têtes. Et puis d’un coup, les portes s’ouvrent, et c’est tout un groupe de gens que je vois se ruer vers moi. Des hommes des femmes de enfants. Mais j’ai beau réclamer et battre des pieds, pas de Guignol à l’horizon, juste une foule bigarrée de personnes hétéroclites.
Certains courent, d’autres traînent. D’autres encore passe devant moi pour aller acheter un journal. Les unes à l’effigie de Zidane partent comme des petits pains. Un groupe de jeunes sportives transportent dans de grands sacs ce qui ressemble à des vélos. Elles sont chargées au point de ressembler aux sherpas qui affrontent les grands sommets.
Je repère assez facilement les familles dont les enfants partent en colonie. Ils cherchent tous le hall Pasteur, ils ont dans les mains de grandes enveloppes estampillées Mairie de Paris et le même nombre de bagages que d’enfants. Et puis enfin, je les vois tous les deux. Je les appelle. Léone m’entend avant de me voir, je la regarde qui me cherche des yeux. Elle se précipite dans mes bras, comme si elle revenait au lieu de partir.
Après un petit câlin et plein de bisous tout doux, nous partons à la recherche du hall… Vaugirard. Eh oui, les grandes transhumances estivales ont cet avantage, qu’elles vous font visiter tous les coins et recoins des gares… Celui-ci est encore plus loin. C’est bien ma veine. Nous sommes accueillies par de jeunes animatrices charmantes qui prennent non seulement les papiers, mais aussi les bagages. Les plus petits bénéficient d’un transporteur pour les sacs. Ouf !
Et c’est reparti pour l’attente. De nombreux parents doivent aller travailler. Ils embrassent leurs mômes et s’en vont vite, vite. Pas une larme. Les gamins sont pris en charge par les jeunes filles qui ont l’air très compétentes. Pourtant, pour la plupart, c’est le premier départ, le premier adieu à papa maman… Léone a sa mine… non, elle n’a pas de mine particulière. Elle fait comme nous, elle attend.
Le train a du retard. Je ne sais plus comment je tiens. Il n’y a rien pour s’asseoir. Sauf les wagonnets pour les bagages. Je m’affale, Léone me rejoint, nous nous faisons un câlin. Et puis c’est le signal. Les enfants, main dans la main et deux par deux suivent les monitrices. Léone, c’est ma main qu’elle préfère. Elle est sérieuse. Elle sourit de temps en temps. Elle observe.
C’est à son tour de monter dans le wagon, elle me colle une grosse bise, serre son papa dans ses bras et grimpe. Nous essayons de la suivre, pour voir où elle va s’asseoir. Elle part dans un sens, puis dans l’autre. Elle tient par la main une autre petite fille. Elles se sourient et s’installent l’une à côté de l’autre. Léone n’a pas un regard pour nous. Elle enlève son blouson, sort ses crayons de son sac. Elle prend ses marque. Puis elle remarque enfin les deux andouilles de l’autre côté de la vite. Elle nous sourit mais fronce les sourcils et nous fait un signe de la main. Elle voudrait bien qu’on parte. J’essaie de prendre des photos à travers la vitre. Le train siffle, il va partir. Un dernier baiser envoyé du bout des doigts, un dernier sourire, et elle est partie. Je suis fatiguée. Tiens, j’ai les yeux plein d’eau.
Je me suis traînée sur le chemin du retour, encouragée par un Nôm compatissant. Les couloirs, le métro dans lequel j’avais peur de m’endormir, les couloirs à nouveau, les escaliers. Nous nous sommes arrêtés pour acheter une baguette de pain. J’ai pris un bon petit déjeuner, avec mon thé préféré. Puis j’ai été me tremper dans la baignoire où j’avais installé le filet qui fait des bulles et donc des remous, moyennant un bruit tout à fait supportable quand on n’entend déjà plus rien. Je m’y suis endormie. Puis je suis sortie, râfraichie par l’eau froide, les muscles dénoués. J’ai été embrasser le Nôm et j’ai couru vers mon lit, qui m’avait tant manqué.
Il était 11 heures…
1. Le lundi 17 juillet 2006, 10:58 par Vroumette
Naaaaaaaaaaaan, à un moment donné tu es fatiguée ! Etonnant !
2. Le lundi 17 juillet 2006, 11:16 par Akynou
Au fait, tu as vu que je tiens compte de tes remarques et que je poste par épisode…
3. Le lundi 17 juillet 2006, 14:04 par Vroumette
Ouiiiiiii ! M’enfin on y est presque… parce tes épisodes tu les publies tous le même jour, du coup, ça revient au même (nan mais j’te jure !).
4. Le lundi 17 juillet 2006, 15:31 par Akynou
Oh mais après, tu lis à l’allure que tu veux. Je ne les ai pas tous postés le même jour d’abord. (pfff jamais contente!!!).
5. Le lundi 17 juillet 2006, 16:24 par Vroumette
J’adore te faire râler, c’est trop facile !
6. Le lundi 17 juillet 2006, 16:34 par Akynou
Normal, c’est ma première nature. 
7. Le lundi 17 juillet 2006, 04:28 par Anitta
Je vais sans doute te surprendre, mais… à ta place, je ferais pas ça tous les jours !
8. Le lundi 17 juillet 2006, 07:14 par Erin
Wahou ! Quelle énergie ! Mais comment tu fais ?
Supernana je savais déja, mais la ce serait plutôt mégasupernana.
Allez profites en pour te reposer maintenant 
En tout cas tu m’as tenu en haleine tout au long des billets, et je sentais ta fatigue me tomber sur les épaules au fur et à mesure… Et puis ces départs de tes filles… ça m’a remué là-dedans. J’ai la mienne depuis hier pour 3 semaines (j’ai sacrifié une de mes semaines pour ma mère…), ensuite je serais 4/5 semaines sans la voir…
9. Le lundi 17 juillet 2006, 10:55 par andrem
C’est l’été. Alors évidemment, tu traînasses, je le vois bien.
Je t’aurais cru plus active.
Où donc ai-je encore mis mes pantoufles?
10. Le lundi 17 juillet 2006, 10:58 par luciole
ben moi j’avais les larmes aux yeux quand Léonne est partie … Mais bon en ce moment je pleure même devant les pubs ! MDR ! Ah les hormones j’vous jure ! plein de bises!
11. Le lundi 17 juillet 2006, 11:04 par Vroumette
Bon tu remarques que je rattrape mon retard !
Dis, j’ai les jambes coupées à avoir lu ces 24 heures. Chuis crevée (et pourtant, j’ai pas bougé de derrière mon écran). Et depuis, j’espère que tu y vas « piano ».
12. Le lundi 17 juillet 2006, 11:14 par Akynou
Bon, le petit plug in, il est sympa, mais il n’est pas pris en compte par Sage pour le fil RSS des réponses. c’est con. Personne ne sait que je lui réponds. Pourtant, j’ai répondu à tout le monde…
13. Le lundi 17 juillet 2006, 11:58 par Bra
Ouf, la journée a été longue, mais elle semble se terminer…
14. Le lundi 17 juillet 2006, 14:02 par Vroumette
Ah ben ouaih, c’est con si Sage voit pas (j’aime bien enfoncer le clou). T’inquiète, on repasse ici de toutes façons !
15. Le mardi 18 juillet 2006, 11:10 par Fauvette
Jouréne éreintante, mais c’est pour la bonne cause : les petites au vert !
Cool, maintenant hein, pas courir !
16. Le mardi 18 juillet 2006, 13:22 par Akynou
J’y arrive pas. Mais à midi je déjeune avec Nounou et ça, ça va être bien 
