Il faut fêter tous les anniversaires, même ceux qui ne sont pas gais. Parce qu’on se dit que, quand on commence une nouvelle année, il y a une toute petite chance pour qu’elle soit différente, meilleure, moins pire. Malgré tout ce que je peux voir dans la vie [surtout celle des autres, je croise les doigts], je reste une incorrigible optimiste…

L’an passé, à la fin janvier, un petit garçon avait faillir mourir de froid. L’EDF avait coupé l’électricité – donc le chauffage – chez lui au début de l’hiver. Et l’an passé, l’hiver a été rigoureux à Paris. Les enseignants et les parents d’élèves s’étaient mobilisés, la presse avait réagi. Deux jours plus tard, EDF rétablissait l’électricité.

Les enfants sont toujours à l’école. Ils vont bien. La vie n’est pas douce pour eux. Mais ils ont un toit, ils ont chaud. Ils sont nourris.

Quelques semaines plus tard, l’Académie de Paris avait décidé que les écoles de notre quartier sortiraient du statut de ZEP. Branle-bas de combat parmi les équipes pédagogiques et les parents d’élèves. Il nous fallait expliquer pourquoi nous pensions, nous, habitants du Bas Montmartre, que la ZEP était toujours d’actualité. J’avais écrit à ce sujets trois notes que j’avais appelé « Tout Monde » m’inspirant du livre d’Edouard Glissant. Les parents ont occupé l’école, alerté la presse. Nous commencions à être rodés. L’inspecteur d’Académie a demandé la réunion d’un Conseil d’école extraordinaire pour nous expliquer sa position. Le débat n’a pas eu lieu. Il a expliqué sa façon de voir. Nous la nôtre, il ne nous a pas écouté. De toutes façons, les dés étaient déjà jetés. Il avait déjà été décidé de ne pas toucher au quartier. Pour le moment. Grâce à notre mobilisation, nous avions échappé au massacre.

Si l’inspecteur d’Académie m’avait écoutée, il m’aurait peut-être entendu raconter l’histoire de cette femme, dont la fille aînée était scolarisée en maternelle, qui, n’ayant plus de logement, avait été placée par le Samu social dans un hôtel miteux où couraient les blattes, dans lequel elle n’avait pas le droit de rester dans la journée. Je me revois encore lui décrivant la maman passant sa journée dans la rue avec son petit dernier dans la poussette, marchant le long du boulevard pour ne pas laisser le froid l’engourdir, entrant dans les magasins pour prendre un peu de chaleur, allant chez les uns, chez les autres, ceux qui avaient un toit, jusqu’à 16h30, heure où elle récupérait sa fille et rentrait enfin, avec ses deux enfants, dans sa chambre miteuse où elle ne pouvait même pas leur cuisiner un repas chaud.

Quand nous savons qu’un enfant vit à l’hôtel, avec ses parents, c’est la première chose que nous demandons : est-ce qu’il y a de quoi faire la cuisine ? Car si nous savons que les plus âgés, scolarisés, mangent au moins un plat chaud le midi, nous savons aussi que bien souvent, ce n’est pas le cas pour les plus jeunes.

Il y a un an, je parlais déjà d’Aya*.

Aujourd’hui, c’est son anniversaire. Je n’ai pas grand-chose à lui offrir. Sauf mon blog pour essayer de faire encore et encore parler d’elle, dénoncer l’attitude du Samu social.

Vous pouvez en faire autant. Ou écrire au Samu social. Je vous donnerai par mail le véritable nom de la Famille T. Et, dans quelques semaines, quand je vous annoncerai qu’Aya va bien, qu’elle a accouché d’un beau petit bébé en pleine santé, que Nour passe brillamment en CE1, vous sourirez et vous direz : « On a réussi. »

On peut rêver. Mais n’oubliez pas que ça peut marcher.

(*) Je rappelle que les prénoms des membres de la famille ont été modifiés pour leur éviter toute représailles.
(**) Si vous voulez écrire au Samu social, voici leur adresse : samu social de Paris, 8, rue Jeanne Jugan, 75012 PARIS. N’oubliez pas de me demander par mail la vraie identité de la famille T.

1. Le vendredi 17 mars 2006, 18:42 par Clopine T

d’accord pour l’adresse, tu as mon mail, Alynou, et ma bonne volonté aussi

Clopine Marie

j’écris de suite à france CUl, mais sans grand espoir.

2. Le samedi 18 mars 2006, 10:30 par Chikungunio

ma vie de jeune con en cpe

la vie au jour le jour de Michel un jeune français qui a contracté un cpe (contrat précaire emploi).

generationcpe.blogspot.co…

3. Le samedi 18 mars 2006, 15:49 par Flourig

Je ne viens pas souvent sur ce blog, alors je n’ai pas tout suivi. Mais je suis révoltée.
Moi aussi, je suis enceinte, mais je suis dans le camp des chanceux.
Ce bébé, il est prévu pour quand, exactement? Est-ce qu’on peut lui envoyer des habits ou des joujoux (j’ai bien lu qu’ils ne voulaient pas d’argent, mais si on fait des cadeaux au bébé?)?

4. Le dimanche 19 mars 2006, 01:20 par Akynou/racontars

Flourig. Je vais demander. Ce qui est certains c’est que pour le moment, ils ne faut pas trop charger les valises :-)

5. Le dimanche 19 mars 2006, 15:25 par Oxygène

Akynou, merci de m’envoyer les coordonnées de la famille d’Aya, je vais écrire au Samu social. Je suis d’autant plus en colère que l’an dernier, Xavier Emmanuelli est venu dans mon lycée présenter son Samu social et a embballé les élèves . Les pauvres! S’ils savaient !

6. Le mardi 21 mars 2006, 14:34 par Vroumette

Pas de souci pour que tu m’envoies par mail les infos, j’écrirai.

La discussion continue ailleurs

1. Le samedi 18 mars 2006, 09:43 par On Air

Aya, B?ir, Nour et Karim : ne les oublions pas

Comme Franck Paul, j’esp? que d’en parler et de faire circuler l’information pourra produire un effet positif, quel qu’il soit. Alors n’h?tez pas ?elayer!

2. Le dimanche 19 mars 2006, 10:44 par Traou

Une famille en danger

Je vous invite ?ire chez Akynou le r?t de la situation intol?ble de la famille d’Alya : une maman dont la grossesse se passe mal, deux petits enfants emp??d’aller ?’?le parce que le Samu social les ballade d’h? en h?…