Elle lisait La Peste.
Il faut que j’en parle. Je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite. Je n’ai pas compris tout de suite. En fait, je crois, je ne suis pas sûr, je n’ai sans doute pas encore tout compris.
Donc elle lisait La Peste. Son voisin, lui, lisait un autre bouquin. Que je ne connaissais pas. Je trouvais le titre idiot : Vous l’aurez tous. Je me suis dit : encore un de ces roman dans lesquels, sous couvert de modernisme, on use d’une langue dont le seul relief est un pseudo parler banlieue.
Je les regardais tous les deux. Elle d’abord, puisqu’elle était en face de moi. Plutôt jolie, mais d’une beauté glaçante, froide, blanche, très blanche, avec des cheveux et des lèvres très rouges. Lui ensuite. Une statue de marbre. En fait, il me rappelaient les dessins de ce dessinateur yougoslave dont je ne me souviens jamais du nom. Comme il s’appelle déjà ? Ce n’est pas Kusturica, lui c’est le cinéaste musicien. Flûte, impossible de le retrouver.
Je les regardais donc tous les deux, et puis je pensais à autre chose. Mon regard se perdit dans le paysage qui défilait. Les jardins, les maisons, les pavillons, les immeubles, puis les barres et enfin la ville.
Enki Bilal ! Ça y est, j’ai trouvé. Je rejetais un coup d’œil sur mes vis-à-vis. C’était cela même, des personnages à la Bilal. Le train entrait en gare. Je me levais. Eux restèrent assis. Je n’y fis plus attention puis les oubliais complètement.
La gare du Nord est toute proche de Lariboisière où je prenais mon service aux urgences, ce matin là. Et ce n’est qu’au quatrième cas que je les ai revus, tous les deux, les anges de la mort, et leurs livres.
Vous l’aurez tous… La Peste.
Ceci est ma participation au jeu de Kozlika, le billet en sablier n°9
Si vous séchez sur le diptyque, allez vous amuser avec le sablier de la fin des blogs