Les nouvelles ne sont pas terribles. Aya a rencontré une journaliste du 18e du mois, c’est la seule qui ait été intéressée par l’histoire. Il faut dire que l’actualité ne joue pas en la faveur de la famille T. L’amie qui gère leur dossier avait trouvé une solution pour que l’aînée des enfants puisse être à nouveau scolarisée, qui était de l’héberger la nuit et l’amener à l’école le matin. Mais la petite n’a pas supporté d’être éloignée de sa famille. Elle a pleuré presque sans discontinuer pendant deux nuits, appelant son papa et sa maman. Cette enfant, comme le reste de la famille, est tellement angoissée qu’elle ne peut supporter une séparation, même temporaire. Et pourtant, elle adore l’école…

Jusqu’à présent, la famille refusait toute aide matérielle, mais nous pensons qu’il va falloir en venir là et lancer uns souscription. Mon amie prépare également une pétition.

J’ai écrit aujourd’hui une lettre destinée à Xavier Emmanuelli, président fondateur du Samu social. Copie en sera adressée à Mme Parigi, la directrice générale. Si vous avez quelques minutes, vous pouvez faire de même (et vous inspirer largement de ce courrier). Que ceux qui sont prêt à écrire m’envoient un mail, je leur donnerai alors les vrais noms d’Aya et des siens.

J’ai croisé Aya ce matin (elle allait au rendez-vous avec la sage femme). Elle est toute menue dans son manteau d’hiver. On ne la croirait pas à 7 mois de grossesse. A peine à 5. Elle me paraît plus mince que lorsque je la voyais tous les jours, quand elle emmenait sa fille aînée à la maternelle. Je lui ai offert un pot de confiture pour son anniversaire, de celle que j’ai faites la semaine dernière. C’est tellement dérisoire. Et pourtant, quel beau sourire elle m’a offert…

Dr Xavier Emmanuelli
Président fondateur
Samu social de Paris
35, avenue Courteline
75012 PARIS.

Paris, le 22 mars 2006

Monsieur le président, monsieur le Ministre,

L’an dernier, à peu près à la même époque, je signais une pétition pour que Karim, 3 ans à l’époque, et Nour, qui allait avoir 6 ans, puissent trouver un hébergement d’urgence près de leur école. Car quelques semaines plus tôt, le 9 février 2005, cette famille, prise en charge par le pôle famille du Samu social, avait été envoyée dans un hôtel insalubre (cafards dans les chambres, sans ascenseur ni eau chaude) de Drancy, soit à presque deux heures de transport de l’école, dans le 18e. Karim était (il est toujours) malade. Il n’a qu’un seul rein fonctionnel et il est asthmatique.

En réponse à la pétition signée par une grande majorité de parents d’élèves et de gens du quartier, les T ont été envoyés au Bourget, dans un hôtel décent certes, mais encore plus loin : pour venir chaque matin, les enfants et leur mère devaient prendre le bus, le RER, le métro où ils devaient faire deux changements. Dans ces conditions, c’est peu dire qu’e Karim a peu fréquenté sa classe. Mais comme l’a dit une des interlocutrices du Samu social : « Ce n’est pas grave, l’école n’est pas obligatoire à son âge… »

Nous sommes en mars 2006, et la situation n’a fait qu’empirer. La famille a été ballottée d’hôtel de banlieue en hôtel de banlieue (avec quelques étapes à Paris). En septembre Nour est entrée en CP, toujours dans le 18e (quand on change de logement tous les mois, que prendre comme base pour la scolarisation des enfants si ce n’est ce qu’ils ont toujours connu). Aya, la maman, a débuté une nouvelle grossesse. Les allers et retours la fatiguaient énormément.

Le 6 janvier dernier, enfin, la famille obtenait une place dans un hôtel place de Clichy, non loin de l’école. Grâce aux élus du 18e, leur demande de régularisation est en très bonne voie. Nous entrevoyions pour eux la fin de la galère. Malheureusement, la grossesse de Mme T se passe mal, elle est trop fatiguée. Pendant les vacances de février 2006, elle a été hospitalisée une semaine à Lariboisière. Le médecin lui a délivré un certificat médical lui indiquant de rester au repos.

Et le 24 février, c’est la catastrophe. Alors que L’assistante sociale obtenait du Samu social la confirmation du maintien de la famille à l’hôtel de la place Clichy et des services sociaux de la mairie du 9e le suivi de la famille, les T reçoivent à l’hôtel un appel du pôle famille du Samu social : ils sont envoyés aux confins de Bobigny (4 stations de tramway après le terminus). Mme T proteste qu’elle a passé une semaine à l’hôpital, que, sur avis médical, elle ne doit pas bouger. Qui accompagnera les enfants à l’école ? Si son mari les accompagne, comment pourra-t-il travailler ? Son interlocutrice lui a répondu que « ce n’est pas [son] problème ».

Depuis la situation a évolué, mais pas dans le bon sens. Mme T a été hospitalisée en urgence une seconde fois. Ne pouvant pas effectuer les trajets, les enfants ont été déscolarisés. Et les élus, près à intervenir et à aider cette famille, ne peuvent le faire car elle n’a pas de domicile. Ainsi, alors qu’ils n’ont pratiquement pas de revenus, les T ne peuvent-ils même pas bénéficier des réductions de cantine.

A par de se retrouver sous un pont de Paris, la situation, pour eux, ne saurait être pire. Et tout ça pourquoi ? Parce qu’au Samu social, personne ne veut les entendre, personne ne veut les comprendre, personne ne veut faire un effort. « Vous comprenez, ils ne sont pas les seuls. » Mais si aider les gens, c’est ne pas tenir compte un minimum de leur existence, de ce qu’ils vivent, de ce dont ils ont réellement besoin, à quoi ça sert ? Où est la grande idée ? Où est l’humain, ou est l’humanitaire ? Cet humanitaire que vous avez toujours défendu et qui a justement présidé à la création du Samu social de Paris.

Aucun témoin de cette affaire – parents d’élèves, enseignants, journalistes, bloggeurs – ne comprend l’attitude du Samu social. La majorité en sont indignés. Ce n’est pas l’image qu’ils ont du Samu social. Nous connaissons tous ses missions, son travail sur le terrain. Mais là, quelle faillite !

C’est vrai, la période est difficile. C’est vrai, trop nombreux sont les cas d’urgence. Mais comment rester à ce point indifférent, comment les gens du Samu social peuvent-ils répondre : « Ce n’est pas notre problème. » Et rester sourd à la détresse de cette famille dans la galère depuis plus d’un an.

Faudra-t-il qu’à nouveau, un bébé meurt pour que votre institution réagisse ? Faudra-t-il que Mme T fasse une fausse couche pour qu’enfin on prenne en compte sa demande. Faudra-t-il que l’état de santé de Karim se dégrade dangereusement pour qu’on lui vienne en aide ? Cette famille ne demande tout de même pas la Lune, juste une chambre pas trop loin de l’école des enfants.

Les interlocuteurs du pôle famille du Samu social répondent que cela n’existe pas. Visiblement, ils sont mal renseignés. Dans le quartier du bas Montmartre, où sont scolarisés les enfants T, il existe une dizaine d’hôtels, dits abusivement sociaux, qui hébergent des familles dans le besoin ou des primo arrivants. La population de ces hôtels change régulièrement. Ces chambres, ces hôtels existent. Nous les connaissons. Nous passons devant tous les jours, nous voyons les familles y entrer, en sortir. Nous connaissons ces familles. Alors pourquoi nous dire que cela n’existe pas ?

Cette lettre, Monsieur le Ministre, c’est un cri. Le cri d’une mère de famille qui ne peut supporter ce que subit une autre mère de famille. Je ne vous demande pas d’y répondre. Je vous demanderais juste de bien vouloir faire en sorte que la famille T obtienne ce qu’elle demande, pour que la fin de la grossesse de Mme T se passe bien et pour que Nour et Karim puissent retourner à l’école.

Dans l’attente, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, mes salutations les plus respectueuses.

1. Le mercredi 22 mars 2006, 10:32 par clopine trouillefou

ne peut-on monter un site de soutien sur internet, avec signatures (pétition), comme cela se fait prfois pour d’autres causes ?

Akynou, je crois que CactusJoe sait faire ce genre de trucs. pas moi, hélas

Ta lettre est si émouvante qu’on la mettrait en t^^ete du site.

Où doit-on envoyer les chèques de soutien (même si, hélas, il n’est pas bien gros le chèque°

Le papa ne peut-il trouver du travail (que fait-il ?) dans une PETITE ville (genre Forges les Eaux) on y trait les gens plus humainement, me semble-t-il (enfin des fois)
?

Clopine

2. Le mercredi 22 mars 2006, 14:30 par andrem

Akynou, je rejoins Clopine pour l’idée d’un blogue exceprès, histoire de lancer un buzz qui ressemblerait à Garfield.

Ceux qui sont assez émus pour relayer tes cris dans les blogues de certains autres ne se feraient pas jeter avec des gros mots. A la surprise générale de ceux qui aiment bien les blogues de certains autres.

C’est un peu ce que tu espères aussi, non, qu’on te relaie, qu’on transporte ta voix. Non?

Aya a du souci à se faire en plus des soucis qu’elle a.

3. Le mercredi 22 mars 2006, 19:52 par Fauvette

Tout à fait d’accord avec Clopine et Andrem. L’union faisant la force, je crois qu’ils faut être nombreux pour faire pression.

4. Le jeudi 23 mars 2006, 00:41 par aude dite Orium

envois moi les noms. Bisous

5. Le jeudi 23 mars 2006, 10:45 par akynou/racontars

Pour le blog, pourquoi pas. Mais je n’ai pas le temps de me pencher la dessus. Ça pète un peu de partout en ce moment même si je ne peux pas en parler. Et puis il faudrait que les gens viennent sur ce blog. Nous ne sommes pas dans configuration de Garfield, qui était lui-même blogeurs, avaient ses lecteurs, etc.
Dans la blogosphère, je suis la seule à connaître Aya. Ça ne pèse pas le même poids.

6. Le jeudi 23 mars 2006, 13:03 par PrincessH

Envoie les noms…. :-)

7. Le jeudi 23 mars 2006, 14:47 par Anne

Nous sommes déjà plusieurs à avoir mis des liens vers tes billets, j’espère que ça sera déjà un début… Et comme PrincessH, peux-tu m’envoyer leurs noms s’il te plait ?

MErci m’dame.

8. Le jeudi 23 mars 2006, 18:26 par Fauvette

J’avais oublié de te préciser de m’envoyer les noms. Merci.
Et courage.

9. Le samedi 25 mars 2006, 05:01 par helene

si tu peux donnes leur adresse, ils ont besoin de quoi surtout??? Si on peut les aider… et partir de Paris??? Helene

10. Le samedi 25 mars 2006, 09:35 par gavilan

Un blog c’st pas le tout. C’est surtout une référence, un point d’information. Mais c’est utile, si il y a un un peu de mobilisation autour, il faut créer un petit groupe autour de parents d’élève par exemple. Pour des régularisation on l’a vécu voir www.jcac.blogspot.com et slmmc.blogspot.com/ Courage

11. Le samedi 25 mars 2006, 10:03 par gavilan

Des journalistes ça se trouve, ceux qui se sont intéressé à JCAC ne seraient pas nécessairement indifférents, ce qui les a intéressé c’est aussi la mobilisation du quartier. Un mail SVP.