Sélectionner une page

Jeudi 10 aout (5) Après le monastère et la bouffe

Voir Nazaré et se baigner

(…)

Depuis le début de l’après-midi, on observe un nuage gris au dessus des maisons. Il y a probablement un feu quelque part. Cela fait plusieurs jours qu’à Granho, nous observons que le ciel n’est pas bleu comme les premiers temps, mais comme recouvert d’un voile gris, un peu métallique. Maria nous a donné l’explication : les feux font rage au nord. Certains depuis plus de trois jours. Au Portugal, il n’y a pas de pompiers militaires, il n’y a que des volontaires et pas des moyens énormes. Et les hommes paient un lourd tribu au maître feu. Certains supermarchés se mobilisent pour les aider, ils vendent des tee-shirts et reversent aux pompiers l’argent ainsi récolté.

Le nuage nous poursuit sur la route. Comme nous n’avons guère les moyens de suivre l’actualité, je ne sais pas du tout où sont les incendies. Je crains toujours de me retrouver au milieu de l’un d’eux, sachant toutefois que toute route dangereuse serait immanquablement fermée. Mais je n’en scrute pas moins le ciel, c’est sûr, ça brûle pas loin.

D’Alcobaça à Nazaré, il n’y a qu’une demi-heure de route et encore en trainant. Mais la cité balnéaire est – époque oblige – prise d’assaut. On circule mal et, surtout, c’est la galère pour trouver une place où se garer. Nous finissons toutefois par y arriver. Dans un chemin de terre. Bordé d’immenses roseaux. Une camionnette vient de partir, je me glisse à sa place. Nous prenons les serviettes, les maillots de bain, le parasol et la direction de la plage.

Celle-ci est immense, mais noire de monde. Enfin. Les vingt premiers mètres sont déserts. Mais on n’y voit pas la mer. A partir des paillottes, c’est serviette contre serviette. Nous dénichons pourtant un petit espace de sable, pas trop loin de l’eau et libre de droit. Installation, plantage de parasol, déshabillage, plongeage dans l’eau. Enfin plongeage, ça dépend pour qui. L’eau est définitivement froide et Lou a du mal à se lancer, contrairement à ses sœurs que rien n’arrêtent.

Les vagues sont sérieuses. Je passe donc la petite barre avec Léone munie de ses bouées car elle n’aurait aucun moyen de résister à l’eau si elle restait sur le bord. Ses sœurs, elles, jouent avec les vagues jusqu’à ce que Garance s’en prenne une plus forte que les autres et se retrouve 3 mètres plus loin, le cul dans le sable, à pleurer.

Léone qui, en ce qui concerne la mer, n’est pas des plus téméraires (et c’est très bien ainsi) préfère aller agiter le sable à côté de son père. Elle est rejointe par ses sœurs. Je peux relâcher mon attention et aller m’écrouler sur ma serviette. Le sable à la blondeur du sucre de canne. On en mangerait. Je le laisse filer entre mes doigts inlassablement

Lou a décidé d’enterrer ses jambes. Quand elle parvient à ses fins, avec l’aide de Garance, elle est toute étonnée de ne pas réussir à les libérer. Garance ensuite se transforme en sirène. Allongée sur le dos, elle laisse Léone et Lou couvrir son corps de sable. Puis la grande lui dessine des nageoires. Garance veut bien jouer à s’ensabler, mais à la condition que cela ressemble à quelque chose…

Évidemment, elles sont couverte de sable et décident d’aller se rincer. Je les suis avec l’appareil photo. Cela dit, je me trouve pas très maligne. Je mitraille, mais si quelque chose arrivait, je serais bien obligée de plonger, appareil photo ou pas. J’ai déjà noyé mon premier numérique et le Camescope pour repêcher Léone. L’idée de sacrifier mon Canon ne me sourit guère. Je vais donc le ranger dans mon sac et court rejoindre les filles. Si Garance est emportée par une vague plus forte, je serai plus efficace.

Les deux grandes sont bien loin de ces pensées. Elles se marrent comme des bossues à se laisser fouetter par les vagues. Garance se jette de bon cœur dans les flots et elle explose littéralement, ce qui l’a fait hurler de rire. J’apprends à Lou à plonger sous les rouleaux. C’est toujours un truc bon à savoir quand on est prix par leur vitesse et qu’on n’a pas pu s’éloigner. Et surtout, je le répète, vague après vague, qu’il ne faut jamais tourner le dos à la mer, quitte à en sortir à reculons.

Garance n’en a cure. Ça ne loupe pas, une vague plus forte la happe alors qu’elle se redressait et l’entraîne. Elle s’en sort seule, haletante. Elle a eu un peu peur. Elle fait plus attention. A peine. De toute façon, avec la mer, la connaissance s’acquiert avec l’expérience. Il faut juste que je ne relâche pas ma surveillance. Jamais. Jusqu’à ce que je sente qu’elles savent. Et visiblement, ce n’est pas pour tout de suite. Ce n’est pas encore pour moi les séances de farniente à la plage avec un bon bouquin.

Le soleil descend sur l’horizon. Il est temps de penser au retour. Nous nous rhabillons et gagnons la voiture. Quelques petits embouteillages pour sortir de la nasse et, très vite, l’autoroute. Au premier péage, pas de CB, juste la Multibanco. Je m’y attendais. En fait, j’ai remarqué que les cabines jaunes ne prenaient pas les cartes, les vertes, si. Tout dépend en fait de la société d’autoroute à laquelle elles appartiennent. Suffit de le savoir et de la prévoir.

Au Portugal, il faut toujours au moins avoir 10 euros sur soi. Vous n’irez pas loin mais au moins vous sortirez de l’autoroute.

Les filles s’endorment dans la voiture. Le Nôm se met également à somnoler. Je roule à tombeau ouvert. Comme tout le monde. Le retour à la réalité française va être dur. Moins d’une heure plus tard, nous sommes à la maison. Les filles vont à la douche pendant que nous préparons le dîner : spaghetti, sauce tomate (avec celles du jardin) agrémentée d’oignons et de quelques morceaux de chorizo. Tout le monde se régale.

Après dîner, nous chargeons les photos sur l’Ipod puis sur l’ordi de maman. Ainsi, j’ai une double sauvegarde. Je les visionne avec Lou et Garance. Nous les commentons, comparons les mérites des unes et des autres. Garance me raconte les malheurs qu’elle a eu avec son appareil (mon ancien) pour faire des photos nettes sans flash en intérieur. Il va falloir que je lui apprendre deux ou trois trucs.

Au début, les filles photographiaient systématiquement les mêmes choses que moi. Maintenant, elles prennent de l’autonomie. Je finis par les envoyer au lit pour être un peu au calme. Je suis fatiguée, j’ai besoin d’être tranquille pour savourer la fraîcheur de la nuit. Fraîcheur toute relative, mais cela fait du bien après la touffeur de la journée… Et les mouches ont enfin déclaré forfait. Les mouches, quelle plaie !

Vous pourrez voir les photos du Portugal dans mon album… Petits veinards…