Je ne lisais pas le blog de la petite anglaise. Il me serait difficile d’affirmer le contraire. Pas que ce qu’elle écrit ne m’intéresse pas, mais parce que anglaise oblige, elle l’écrit en anglais. La langue de Shakespeare ne m’incite pas vraiment à la lecture, en tout cas pas à la lecture de détente.
Si je parle aujourd’hui de ce blog, ce n’est pas pour son contenu ni la langue qu’il utilise, et encore moins pour le talent de l’auteure que je suis bien incapable de mesurer. C’est pour une question de principe. Cette jeune femme a été licenciée par son employeur, Dixon Wilson. Parce qu’elle tenait un blog. Dont le sujet central, pour autant que je puisse en juger (lire l’anglais m’est pénible, mais je comprends quand même la plupart des textes pour peu que je me donne un peu de mal), n’était pas son employeur. Mais sa vie à elle, de petite Anglaise habitant en France avec sa famille…
Evidemment, dans la vie de toute femme qui travaille, l’emploi tient une place importante, et on en parle… Est-ce que cela porte préjudice à l’entreprise ? A moins que la totalité (ou même une partie) de la clientèle de ce cabinet lise ce blog et, par la suite, file voir la concurrence, cela me semble difficile à argumenter.
Pourtant, c’est ce grief qu’a retenu Dixon Wilson contre son employée. La pêché était si grand qu’ils ont décidé une mise à pied à titre conservatoire, ce qui entraîne automatiquement un licenciement pour faute grave [cela m’est arrivé une fois, pour des raisons assez iniques (même pas de blog à me reprocher) et mon employeur d’alors a été obligé de me réintégrer, niark niark]… Même si par la suite, la faute est requalifiée, cela montre l’intention de l’employeur : virer petite Anglaise en lui payant le moins de droit possible…
Je trouve cela, comment dire… bêta, mais pas vraiment étonnant. En tant que déléguée du personnel, j’ai vu pire. Dans ces cas-là, je demande toujours à l’employeur pourquoi il n’a pas préféré d’abord la communication à la sanction. Dans ce cas précis, il aurait sans doute suffit de dire à petite Anglaise : « Ecoutez, on a trouvé votre blog. Ce que vous dites sur nous nous gêne beaucoup. Nous considérons que ça peut porter atteinte à notre image. Nous vous demandons d’enlever tout ce qui a trait à l’entreprise sous peine de sanction. » J’imagine que petite Anglaise aurait dit oui. Et l’affaire s’arrêtait là. Personne n’en aurait rien su. Mais voilà, maintenant, nous sommes des centaines à nous ruer sur le cache Google de petite Anglaise pour essayer de comprendre. Si quelqu’un nuit à l’image de marque de Dixon Wilson, c’est Dixon Wilson soi-même.
Quand on en arrive à ce degré là de non intelligence, j’ai tendance à penser que c’est volontaire. Dans tous les cas que j’ai eu à suivre en tant que déléguée du personnel ou dans les aléas de ma carrière, j’ai remarqué une chose : quand un patron est à ce point idiot, c’est que sa décision est prise bien antérieurement à la constitution du délit. Et le délit n’est qu’un prétexte à licencier une personne. Quelle que soit la vraie raison d’ailleurs. Elle peut être d’ordre très divers : compression masquée de personnel, inimitié avec un supérieur, volonté de caser un de ses poulains en lieu et place de la personne licenciée, etc. Dans ces cas-là, inutile de faire appel à l’intelligence, il faut lourder à tout prix, quel qu’en soit le coût.
Devant tant d’entêtement, je me laisse aller à penser que les gens que j’ai en face de moi sont de fieffés imbéciles avec une capacité managériale proche de zéro. On parle de perte de confiance. Mais quand un patron fait à ce point le con, le salarié est en droit de douter…
En tout cas, le cabinet Dixon Wilson a réussi son coup. Lui qui craignait pour son image de marque, on peut dire qu’il fait un sans faute pour la détruire. afoe fait un parfait résumé de la presse anglaise qui s’est emparée de l’affaire. Même les Belges en parlent…
Maître Eolas, dans deux billets, disait que Dixon Wilson s’était tirer une balle dans le pied, et même du gros calibre. A la lecture de la presse, et de son billet commentant la lettre de licenciement (un morceau d’anthologie, les commentaires d’Eolas, pas la lettre de licenciement) de petite Anglaise, je confirme. C’est même pas une balle, c’est une rocket…
Cela dit, comme pour Garfieldd, si pour soutenir petite Anglaise, je dois publier un de ces posts en anglais pour bien montrer la vacuité des attaques de son ex-employeur, que mes lecteurs me pardonnent, mais je le ferai…
1. Le vendredi 21 juillet 2006, 23:46 par Vroumette
Moi aussi je n’avais pas le plaisir de lire petite Anglaise car je devais y comprendre intégralement une phrase toutes les dix lignes (du coup, je ne percutais pas vraiment tout au niveau de l’humour).
Mais hors de question de ne pas se mobiliser, diantre, on va leur faire une pub de la mort qui tue à Dixon Wilson.
2. Le lundi 24 juillet 2006, 12:42 par Guignolito
« quand un patron est à ce point idiot, c’est que sa décision est prise bien antérieurement à la constitution du délit »
Pas forcément. J’ai fait deux fois l’expérience de personnes proches, qui se sont senties extrêmement offensées par mes écrits, alors que je ne les visait nullement. Il suffit qu’elles se reconnaissent dans une description à laquelle un caractère négatif (réel ou imaginaire) est associé.
J’avais lu aussi l’histoire d’une romancière qui avait publié un livre, et perdu dans la foulée sa meilleure amie : cette dernière s’était reconnue dans un des personnages…
Petite Anglaise a écrit qu’elle avait noté, un certain WE, un nombre élevé de connections venant de la ville où vivait son chef. Accès de paranoia, calmé le lendemain quand elle n’a rien remarqué de bizarre au travail. Ce n’est que quelques jours après qu’elle a été virée.
Pour moi, le scénario le plus probable, c’est
Le chef a découvert le site, et il a piqué une colère effroyable en se reconnaissant dans le « Old School Boss ». Les gens n’aiment pas se voir dans leur propre caricature, c’est un fait. C’est là qu’il prend la décision de la virer.
En début de semaine, il ne peut pas la virer tout de suite, car il a du boulot par ailleurs et aussi une procédure à respecter : taper un rapport, consulter le juriste, peut-être obtenir l’accord de ses chefs à lui ou des USA. Bref, une fois que tout celà est fait, il la licencie.
Et qu’il soit obtus est normal : il s’est senti gravement insulté. Là non plus, il faut pas chercher à convaincre les gens.
3. Le mardi 25 juillet 2006, 12:53 par sophie
Voilà à mon humble avis la solution pour que les employeurs hésitent à utiliser l’argument du blog à tout bout de champ. Vous parlez de mauvaise image ? Ne bougez pas on va arranger ça ! J’espère que petite Anglaise retrouvera bien vite un poste ailleurs. Moi non plus je ne la lisais pas (mêmes raisons que toi) mais je suis outrée.