Sur les pentes de la Soufrière en Guadeloupe, bien sûr.
C’était une petite esclave, dont la mère avait été violée par le maître. Ni blanche ni noire, même ses yeux étaient de nuances différentes (tout comme ma fille). Enfant, on la surnomma « Deux Ames », puis Solitude car elle était rejetée par sa mère, pour qui elle était la marque de l’infamie.
Jeune fille, elle réussit à fuir la plantation, rencontra une famille de marrons (esclaves évadés) avec laquelle elle vécu. L’esclavage fut abolit en 1792 (sauf en Martinique que les blancs avaient “vendu” aux Anglais). Dix ans, ils n’eurent que dix ans pour en profiter. En 1802, Napoléon rétablit l’esclavage et envoya Richepance en Guadeloupe, puis en Guyane pour leur remettre les chaînes.
Quand le général débarqua en Guadeloupe, les anciens esclaves prirent les armes et se battirent pied à pied. Solitude rejoignit le rang des résistants, menés par Delgrès. L’histoire est cruelle et l’armée des insurgés fut massacrée. Les survivants se réfugièrent sur les hauteurs de Matouba. Et se firent exploser dans une habitation, préférant la mort au retour à l’esclavage.
Tout comme le personnage de Toni Morrison, dans Beloved, qui préfère tuer ses enfants plutôt que de les voir retourner à l’état d’esclave (c’est un des livres les plus puissants sur le sujet, où l’on commence un peu à cerner la souffrance et l’horreur que vivaient ces hommes et femmes).
Solitude était enceinte. Elle ne fut que blessée dans l’explosion de l’habitation. Faite prisonnière, elle fut condamnée à mort. On attendit la naissance de son enfant, qui alla grossir les rangs des esclaves. Elle fut pendue le lendemain de sa « délivrance » en place publique.
Je vénère cette femme et j’adore ce prénom. Mais finalement, j’ai eu peur qu’il ne soit trop lourd, trop difficile à porter pour une mominette du 21e siècle. Se souvenir c’est bien, mais il ne faut pas donner un trop lourd fardeau à nos enfants.
Il faut lire le très beau livre d’André Shwartz-Bart (alsacien comme Schoelcher et époux d’un écrivaine guadeloupéenne), La Mulâtresse Solitude. Une merveille d’émotion.
Le lundi 22 septembre 2003, 14:12 par Androgyne
vous connaissez Simone Schartz-Bart ?
Le lundi 22 septembre 2003, 14:31 par racontars à Androgyne
C’est la femme d’André. Non, je ne la connais pas personnellement. Mais j’aime bien ce qu’elle fait. Notamment Pluie et vent sur Télumée miracle (je ne suis plus tout à fait sûre du titre) et Ti Jean l’horizon.
Le mardi 14 octobre 2003, 18:29 par Onisha
triste ton histoire :(, mais c une belle histoire, ca me donne encore +envie d’appeler ma fille comme ça ! (si j’en ai une un jour bien sûr, et si le papa voudra bien 