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Les préparatifs de Noël

Une bonne nuit, Une longue sieste. J’ai un peu moins la tête dans le coton. Parce que je dois vous avouer qu’hier soir, j’avais l’impression m’endormir entre deux mots et je ne savais plus du tout ce que j’écrivais. Le Nôm était sorti voir ses copains. C’est une des premières choses qu’il fait quand il arrive : le soir, il pique la Mobylette de son père et part retrouver ses potes. Il n’a bien sûr pas voulu m’en dire plus.

Nous n’avons rien fait aujourd’hui, ni hier d’ailleurs, c’est-à-dire que nous ne nous sommes pas précipités à la plage. Ça attendra un peu. Il faut assurer la voiture et ensuite effectuer quelques paparasseries administratives, comme inscrire Lou à l’école. Et puis préparer un peu noël.

J’ai lu ce matin un papier très intéressant sur la façon de passer noël en Guadeloupe. C’est bien ce que j’avais cru comprendre. Tout est centré sur le meurtre du cochon qui, curieusement fini en croix – c’est plus pratique pour l’éventrer – et la préparation de la bouffe. Les Guadeloupéens aiment bien manger et partager le repas. Ils sont restés très conviviaux pour cela. Il n’y a qu’à voir le moindre mariage ou baptême : il n’y a pas moins de 300 invités qui passent à toute heure de la soirée et qui doivent pouvoir trouver le boire et le manger. C’est une ruine pour les familles. Je me rappelle un couple d’amis qui faisaient baptiser leur fils. Ils ont mis de côté les boissons au fur et à mesure pendant un an. Cela prenait tout une partie de leur chambre qui n’était pas petite. Ce fut une fête impressionnante pour moi, normale pour eux. Pas le service minimum, mais quand même.

Un ami du Nôm, qui est complètement fauché et qui a six enfants, les a tous fait baptiser d’un seul coup. Du coup les aînés étaient en retard dans leur communion, mais pour le dernier, qui avait 2 ans, le baptême était juste à l’heure. Ils ont donc fait les communions des plus grands en même temps. Fritz était censé être le parrain de l’une des filles, mais comme nous ne pouvions pas être là, c’est son frère qui l’a remplacé. Ils n’auraient pas fait les communions en même temps, ils auraient pu changer la date, mais les communions sont traditionnellement en mai. C’est d’ailleurs amusant que des coutumes métropolitaines dues aux saisons soient aussi fortement ancrées ici où il n’est pas question de joli mois de mai ni de printemps. Le mois de mai est le plus chaud, le plus étouffant de l’année. Les vents sont tombés et les pluies sont encore lointaines. Et l’on sue à grosses gouttes sous les falbalas des costumes de communiantes et les habits de fêtes des invités.

Pour en revenir à noël, nous allons essayer de trouver un « chanté nwel » où aller avec les filles. Au moins avec Lou et peut-être Garance qui va adorer. Ce sont des réunions où l’on chante des cantiques traditionnels comme Il est né le divin enfant, mais avec un rythme endiablé. On chante, on danse, on mange (pas de réunion sans bouffe) et l’on s’amuse bien. Les cantiques comme ça, moi je veux bien. C’est tout de même plus sympa que les chants qui s’endorment.

Hier, la seule sortie que nous avons faite, c’est à l’aéroport. Et d’un coup, j’ai eu trop chaud. J’ai fini par comprendre pourquoi. C’est mon syndrome « sortie d’avion ». Lorsqu’on part de Paris et qu’il fait environ 6 °C, comme cela m’est arrivé quelques fois, et qu’on débarque dans un endroit où il fait plutôt 30 °C (et encore, parce que c’est le soir), la chaleur vous tombe d’un coup sur les épaules. Bien sûr, c’est dans l’aéroport que cela arrive. Et donc à chaque fois que j’arrive dans cet aéroport, j’ai une brusque sensation de chaleur, comme si je sortais de l’avion. Avec le nouvel aéroport international pourtant, on n’a plus à traverser le tarmac.

Cette petite sortie m’a permis de vérifier que les Guadeloupéens étaient tout de même de beaux mâles. J’en ai vu quelques-uns de fort craquants. Notamment un jeune homme de l’aéroport à qui l’uniforme allait fort bien.

Le temps est de saison. D’un coup, le ciel s’obscurcit fortement. Et c’est le déluge. Ça tombe dru pendant dix minutes, puis ça s’arrête. Le soleil reprend ses droits. Quelques minutes après, on a oublié l’averse… Sur la Grande-Terre où nous résidons, ça arrive deux à trois fois dans la journée, rarement plus. Ou alors c’est une de ses journées, heureusement rares, où il pleut sans discontinuer. Sur la Basse-Terre, avec le relief des volcans, c’est beaucoup plus fréquent.

Je suis présentement installée sur la terrasse de la maison. Il est 17 heures, le soleil commence à décliner sérieusement ce qui donne une lumière d’or au paysage. C’est l’heure que je préfère. Idéale pour les photos. La terrasse est pleine de plantes vertes, de jouets d’enfants (surtout depuis notre arrivée faut dire), j’aperçois un oranger, un avocatier, un corossolier. J’aime ça. Derrière la maison, il y a un énorme pamplemoussier qui donne des fruits…. misié misié ! C’est ici que je prends mon petit déjeuner idéal, des œufs coques très frais (poules maison) et un pamplemousse fraîchement cueilli et qui déborde de jus.

La chaleur tombant, la maison se réveille. Il n’y a plus que Léone à qui je viens de donner le sein pour dormir maintenant. Lou s’apprête à partir chez son arrière-grand-mère. Elle a mis une petite robe blanche et des sandales. Elle est ravissante. Comme toujours. Tous les ans, je trouve ici les enfants grandis (normal). Mais les filles m’épatent le plus. Une filleule de la famille est venue nous voir aujourd’hui. Très grande, très mince, des petits seins bien drus, une paire de fesses… Bref une superbe jeune fille de… 13 ans. Je ne sais pas comment sera Lou a l’adolescence. Mais ici, les filles sont des femmes (au moins physiquement) tellement tôt.

Les moustiques, ces bestioles infernales, n’arrêtent pas de nous attaquer. De la chair fraîche et tendre, du nanan pour eux. C’est d’ailleurs le seul bémol que met Lou à son amour de la Guadeloupe. Il y en a de si petits qu’on ne les voit même pas. On ne les entends pas non plus. Mais on les sent par contre. Ils sont sacrément soiffards ceux-là. Les autres, il suffit de les écraser à temps.

Dans les désagréments, nous avons également les fourmis rouges, minuscules elles aussi. Je suis la spécialiste. J’aime m’assoir sur les marches d’escalier, à la fraîche. Et ça m’arrive assez souvent de poser mon postérieur sur une cohorte de ces ouvrières qui m’en laisse un cuisant souvenir. Leur brûlure peut durer des mois (par intermittence heureusement) et il n’y a que le rhum pour la calmer. Et c’est assez curieux comme sensation de s’enduire les cuisses de rhum… Pourvu qu’on ne me les flambe pas !

Ce n’est pas Karukéra l’île aux fleurs qu’on devrait appeler la Guadeloupe, mais bien l’île moustique.