Un dimanche dans le Ribatejo
En général, quand je suis en vacances, ailleurs, le dimanche, j’évite de me promener. Parce que tous les gens qui travaillent, eux, se baladent, et que cela fait beaucoup de monde sur les routes, sur les plages, bref, dans les endroits sympas. Après tout, moi, je peux en profiter pendant qu’eux bossent.
Donc aujourd’hui, on n’a rien fait. Enfin, pas de tourisme. Parce qu’on en a profité pour nettoyer un peu la maison, la terrasse, faire des lessives, d’autant que Léone s’était un peu oubliée dans le lit de Lou. Bref, pendant que les filles jouaient, ou lisaient (Lou est en train de dévorer Le Golem, des Murail), ou travaillaient (il faut que Garance ne perde pas trop de ce qu’elle a acquis ces derniers temps), j’écrivais sur l’ordinateur portable prêté par ma mère, et le Nôm nous concoctais une petite viande de porc à sa façon. La terrasse est vraiment la pièce à vivre de cette maison. Mais il y manque chaise longue et récamier, voire un hamac, comme dans les bonnes maisons créoles. La terrasse, c’est un art de vivre. On se contente ici des chaises en plastique. Mais je serai plus souvent allongée si pour ce faire, je ne devais pas m’installer dans la chambre ou dans le salon.
Après déjeuner, nous avons rangé toutes nos affaires et avons grimpé dans la voiture. L’air était brûlant. Il était temps de trouver un coin où piquer une tête dans le Tage. Nous avions tout l’après-midi devant nous, la voiture est climatisée. Un vrai bonheur…
On dit du Tage que c’est un fleuve qui fait tout ce qu’il veut. En tout cas, c’est une fleuve changeant. Pendant tout notre séjour, sa largeur se réduira de quasi la moitié à Santarem, sans qu’on puisse noter quoi que ce soit de ce genre quand il se fait aussi immense qu’un lac à Lisbonne. Il est parfois tourmenté, aussi dangereux que la Loire. D’autre fois, il s’alanguit dans les marécages voisins et musarde dans de multiples petits bras. C’est en tout cas lui qui commande dans la région. C’est le patron.
Il paraît qu’il existe quantité de petits recoins où il est possible de se baigner. Au début, c’était des plages où l’on allait pique-niquer le dimanche, puis faire la sieste au frais, jusqu’à ce que certains, plus audacieux, osent se jeter dans le fleuve. A nous de voir si nous trouvons…
J’ai roulé jusqu’à Muge, le gros bourg proche de Granho. Sur la carte, il y est marqué comme proche du Tage et la sœur de Maria nous a parlé d’une plage. Que nous n’avons pas vraiment trouvé. Si c’est indiqué quelque part, je veux bien qu’on m’offre une canne blanche. J’y avais vu une pinède, entourée de grillage, avec des tables de pique-nique et décidais d’y aller voir de plus près.
L’air sous les arbres était encore plus chaud que sur la route, ce qui n’est pas peu dire. Pourtant quelques familles étaient installées là, comme au bord de la plage, mais au bord de nulle part. Quelques hommes jouaient aux boules, des femmes dormaient sous les parasols. Lou et Léone sont venues avec moi. Nous avons traversé la pinède qui ne donnait sur rien de l’autre côté, mais nous avons vu, au loin, le Tage et un pont qui le traversait et qui n’était pas indiqué sur la carte (qui a beau être de l’année 2006-2007, elle est incomplète). Et surtout aperçu la route qui y menait. Il suffisait de tourner 50 mètres plus loin.
Nous voilà repartis. Très vite, nous avons eu le choix, soit de monter sur le pont, soit de continuer la route le long du fleuve. Nous avons choisi la deuxième solution. Nous avons quitté très vite la voie goudronnée pour nous retrouver sur un chemin de vaches, au milieu des champs de tomates dans lesquels des machines infernales remplissaient des camions entiers de fruits rouges et murs. Cahin caha, nous sommes de nouveau arrivés près du Tage. Mais de plage, rien du tout. Au contraire, un panneau indiquait le danger de l’endroit. Nous sommes repartis dans l’autre sens. Et nous avons décidé de prendre le pont.
En fait, au départ, ce n’était que le pont de chemin de fer. Qui a été élargi d’une voie pour les voitures. Une structure entièrement en fer, y compris le sol, avec une circulation alternée. Le tout a de la gueule quand on aime les architectures d’acier. Après un long temps d’attente, nous nous sommes, prudemment, engagés. Le Nôm trouvait que je roulais trop près de son côté, c’est que la marge était réduite et je roulais aussi très près de MON côté. Ma mère lui a expliqué dix fois, la dernière fois qu’ils se sont vus, que tant qu’on n’a pas conduit, on ne peut pas se rendre compte de ce que cela veut dire.
En sortant de l’autre côté, nous nous sommes retrouvés à Valada, sur la commune de Cartaxo, celle où nous avions visité le musée du vin et je me suis dit qu’à défaut de Tage, nous pourrions toujours aller piquer une tête à la piscine de la quinta.
J’ai recommencé à longer le fleuve, sur l’autre rive cette fois-ci, et dans la direction inverse. En fait, une énorme digue me le masquait. Un peu plus loin, une rampe d’accès permettait de monter sur cette construction. D’ailleurs deux autres voitures nous montraient l’exemple. Nous les avons imités et nous nous sommes retrouvés de l’autre côté, dans un no man’s land.
Nous avons suivi les voitures qui nous ont emmenés à un coin où quelques familles trempaient. Yes ! Ça nous a semblé d’un coup paradisiaque.
Bon, ce n’était pas tout à fait le cas, mais nous avons fait semblant de ne pas le remarquer. Nous n’étions pas à proprement parlé sur les bords du Tage, mais d’un de ses bras, très peu profond, bordé d’une épaisse végétation mais avec de larges bandes de sables de rivière épais. Nous avons trouvé une petite place, pas à l’ombre, il n’y en avait pas. Le sable était brûlant sous les pieds nus. A peine posées les affaires que nous étions tous dans l’eau, pas très propre il faut bien dire. Mais à la guerre comme à la guerre. Nos voisins n’avaient pas l’air d’avoir de boutons…
D’ailleurs, ce sont nos proches voisins qui ont donné l’alerte. L’eau montait et nous avions posé nos affaires dans son lit. Je suis sortie en catastrophe pour tout déplacer. Et je me suis brûlée les pieds. Je me suis précipitée de nouveau dans l’eau toute fraîche. Un vrai bonheur. Le cul sur le sable, on se laissait porter par la fraîcheur. Les filles jouaient à s’inventer des histoires de sirènes, le Nôm et moi observions les lieux et leurs occupants. Des gens du coin, avec leurs enfants, un jeune couple dont la fille avait l’air timide et rougissant, saisissant le moindre prétexte pour se précipiter dans les bras protecteurs de son amoureux… trop mignons.
Et puis une famille de Gitans. Femmes aux cheveux et jupes longues, se baignant tout habillée, leur sac à main sous le bras. Hommes en groupe, voix et rires énormes. Entre les deux, les enfants et les adolescents. Les hommes nous regardaient de travers. Je les entendais parler Brésil, France, football. A ceux-là, il semble que la défaite de l’équipe nationale contre les Bleus de la Coupe du monde ne soit toujours pas digérée.
Pendant que je faisais la planche, l’un deux, passant près de moi, plongea, faisant beaucoup de remous et d’éclaboussures qui me firent couler. Il rejoignit ses copains en rigolant comme un bossu. « Maman ! vint me dire Lou scandaliser, il a fait exprès et maintenant, il rigole avec ses copains. » Pas la peine de s’en formaliser. Je ne vais pas faire un caca nerveux pour une planche en déséquilibre.
Des familles ont continué d’arriver, l’une d’elles s’installa à côté de nous. Grands-parents, parents et trois enfants. Nous nous saluâmes d’un sourire et d’un boa tarde. Le grand-père, bermuda rouge, avait gardé ses chaussettes pour protéger ses pieds. C’était une bonne idée, mais ça lui donnait une touche assez amusante. Il prit fermement son petit-fils par la main et l’emmena dans l’eau, de plus en plus loin. Les deux sœurs commencèrent à crier : « avo, avo », grand-père. Le père, alerté, s’en mêla et le papi, sans plus s’en formaliser, revint remettre l’enfant, pas rassuré du tout, sur la terre ferme.
Vers 18 heures, nous avons décidé de rentrer. J’étais fatiguée. Et même si la chaleur nous attendait, je voulais revenir à la maison. Il a fallu convaincre les deux dernières qui n’étaient pas du tout d’accord. Je dis convaincre, mais ce n’est pas particulièrement le terme, car dans ces conditions, elles ne sont jamais convaincues du bien fondé de nos décisions. Il fallut pousser la voix. Ce qui nous a bien aidé, c’est quand les guêpes, venues en masse se désaltérer au bord de l’eau, se sont mises à tourner autour d’elles. Lou, surtout, poussait des cris d’orfraie. Elle a une phobie des guêpes et des abeilles qui la rend aussi intelligente qu’une moule. Elle pleure, elle crie maman (qui l’envoie balader ou lui demande de se reprendre et de se contrôler vu que c’est la chose à faire), geint, pleure encore. Le pis, c’est qu’elle entraîne Garance dans sa phobie.
Enfin, la voiture. Les affaires dans le coffre, les filles à l’arrière, et nous revoilà parti. Nous avons repris le pont en prenant des photos cette fois-ci et le chemin du retour, non sans nous arrêter à Muge pour téléphoner à Sophie, que je présente à ma famille comme une amie, mais que je ne connais pas encore. Je lis régulièrement son blog, Sophil’ de l’eau et je me réjouis de la rencontrer, à condition de trouver une cabine téléphonique libre et en état de fonctionnement. C’est le cas de celle-ci. Le hic, c’est que je n’ai plus de monnaie. Il me reste 14 centimes. Je mets toutes mes pièces dans la machine, en espérant que j’aurais assez pour donner à Sophie le numéro de la cabine. Ouiiiiii. Je récupère même 2 centimes.
Nous papotons un moment sur notre séjour, les aléas de la vie au Portugal, mais le fait que oui, ici, les gens sont gentils et accueillants en règle général. Et plus à l’écoute des autres que partout ailleurs. Sauf qu’ils ne prennent pas les cartes %$€& bleues…
Nous décidons de nous voir dans trois jours, le mercredi. Nous irons chez elle où nous attendront un barbecue et une piscine. Et une petite fille qui a l’âge de Léone. Et un petit bébé qui a tenu en haleine toute une partie de la blogosphère au moment de sa naissance. Je suis bien contente.
Nous rentrons à la maison. Chacun vaque à ses occupations. Lou lit, les petites jouent, elles sont devenues voleuses honnêtes en Afrique et se sont rencontrées dans la rue (en rentrant par hasard l’une dans l’autre, quel zazar Mme falzar…)
Le soir, pour le dîner, je cultive les restes. Je fais aussi une salade, une salade de fruit avec un des melons (sans aucun goût) que nous a donné Maria. Et je m’essaie à une sangria avec le vin rouge qu’elle nous a laissé dans le Frigidaire mais qui est terriblement râpeux. Bon, aucun des d’eux n’est vraiment convaincant, ça manque de sucre tout ça. La sangria sera meilleure demain de toute façon.
Au cours de la discussion, nous décidons que la première visite de Lisbonne que nous devions faire initialement mardi aura lieu demain. Ainsi, mardi, nous ferons une petite journée. Et nous serons en forme pour la visite à Sophie. Alors, demain, le grand bain. Je suis un peu tendue. Va-t-on trouver facilement à se garer. Sophie nous conseille de mettre la voiture dans un parking souterrain près du Rossio. Trouverons-nous facilement ? Comment vais-je organiser la journée ? C’est mon seul problème pendant les vacances, et c’est toujours le même. Je suis seule à organiser les journées. J’aimerais parfois me laisser vivre, me laisser guider. Bah, je crains que pour cela, je sois obligée de sacrifier aux voyages organisés. Et ce n’est pas trop mon truc.
Le Nôm finit d’arroser. Toujours cela que n’aura pas à faire Maria. Il en a profité pour laver la voiture. Lisbonne, tiens toi prêt, nous voilà…
Et la suite, ce sera pour lundi car demain je m’en vais récupérer petite dernière que j’ai oublié chez ma mère en revenant du Portugal… En cliquant sur les photos, comme d’habitude, vous pourrez voir d’autres clichés et surtout en plus grand. Bon week-end.
PS : si jamais certains veulent passer quelques vacances dans le Ribatejo (ce que je conseille vivement), voici des noms de plages (et leur communes) que j’ai trouvées trop tard pour nous mais qui peuvent faire gagner du temps : Praia Doce (Salvaterra de Magos); Patacão de Cima (Alpiarça); Porto de Patacão (Chamusca) ou bien, sur l’autre berge du fleuve, Caneiras (Santarém); Palhota et Valada (Cartaxo) et Ia « Vala Real » d’Azambuja. Si vous voulez faire du bateau à moteur rendez-vous sur le barrage de Magos (Salvaterra de Magos). D’autres sports aquatiques sont proposés sur les écluses de Monte da Barca ou d’Agolada à Coruche. Et il paraît que le coin est très beau…




Bonjour
j ai retrouve sur « racontards » (genial) ces paroles :
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie chaque soir, elle arrosait ses petites fleurs grimpan-an-antes avec de l’eau de son arrosesoir. …
Pourriez vous me donner le titre de cette chanson
c est pour ma maman et vous etes la seule ref internet avec le mot « arrosesoi » dont elle se souvient
merci bcp
j adore votre style et vos filles sont superbes !
Cabs
ps mon mail cabannes01@free.fr
Ha voilà l’histoire des deux belles africaines dévoilée ! :-))
Et tout le reste…
Il me faut (parce que j’en ai envie !) venir décidément te lire plus souvent !
A bientôt !