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Les anges dans nos campagnes

En Guadeloupe, en 2006, mon ordinateur portable était tombé en panne, avec toutes les photos qu’il contenait. Un an et demi plus tard, j’ai réussi à récupérer ce que contenait le disque dur et à retrouver mes photos perdues. Une petite bulle de bonheur…

La période de noël me rappelle immanquablement ceux de mon enfance. Notamment ceux où mes parents étaient sans beaucoup de sous. Ils ont longtemps bouffé de la vache enragée. Comme je suis l’aînée, c’est moi qui ai le plus connu cette période-là. Donc, pour les cadeaux, ce n’était pas toujours ça. Il m’est arrivé à Noël d’avoir des fringues pour l’école (pas du genre que j’aurais choisi, du pratique), une brosse à cheveux ou un bon pour un cadeau à venir qui n’est jamais venu. Mes plus jeunes sœurs n’ont pas vraiment connu cette période-là-là enfant. La vache enragée était loin, elles avaient de vrais cadeaux de Noël qu’elles avaient commandés. Quand les vaches maigres sont revenues, elles ont trouvé ça un peu dur

Plus tard, comme elles sont toutes deux devenues comédiennes, la vache enragée, elles l’ont bouffée toutes seules. Surtout l’une d’elles. Elle vit avec une plaie. Il dépense tout l’argent qu’il gagne et bien plus. Et elle tire le diable par la queue. Elle a des jumelles qui ont l’âge de Garance. J’envoie des vêtements pour les petites. Mais il paraît que le môssieur fait la fine bouche. Parce que c’est du déjà porté. Et ma sœur de lui rétorquer que s’il veut les moyens de ses principes d’éducation, il faudrait qu’il gagne plus de sous. Il vient de la banlieue qui craint de Cannes. Et il en a gardé un certain goût pour la marque qui se voit. Même si, par ailleurs, il s’en est bien sorti. C’est un Italien pied noir. Plus macho que lui, c’est à peine imaginable… Il fait des réflexions à ma sœur parce qu’il trouve que sa maison n’est pas assez bien tenue. Pendant un moment, pour lui faire plaisir, elle a passé des heures à faire du ménage, heures qu’elle ne consacrait donc pas à ses filles. Maintenant, elle l’envoie paître. Elle s’est remise à travailler et a monté avec mon autre sœur un spectacle pour enfants.

Toutes les deux habitent Nice et m’ont dit que ça avait chié pendant le sommet. Elles m’ont raconté des choses incroyables sur la police municipale. Le maire n’a peut-être plus l’étiquette Front national, mais il en a gardé tout le reste. Ce qui m’a fait rire, c’est quand elles m’ont raconté qu’ils avaient fait tellement fort avec les bombes lacrymo, que c’était rentré via l’aération dans le palais où était organisé le sommet et que les ministres pleuraient.Mais dans les rues du vieux Nice, les enfants et les personnes âgées, les parents, etc. aussi !

Pluie

Aujourd’hui il pleut moins. En fait il n’a plu qu’une seule fois depuis que je suis levée et il est déjà presque 16 heures (on se lève à 7 heures). La voiture est réparée. Ce n’était que la batterie qui était à plat, ce qui semble logique après un an sans quasi rouler. Donc nous allons pouvoir nous remettre à bouger. Je sais qu’il faut aussi se reposer, mais je commence à me sentir à l’étroit à la maison. D’autant que le Nôm sort, lui, en prenant la Mobylette de son père… Hier il est revenu d’humeur joyeuse après avoir été à un chanté nwel où il a visiblement bu de bons petits coups. Ça m’a énervée.

Au programme des urgences, emmener Léone chez le médecin pour sa visite du troisième mois et parce qu’elle a les oreilles qui suintent. Ça ne lui fait mal que quand on les lui nettoie mais ce n’est pas terrible. Faire les derniers préparatifs pour noël. Apparemment il y a un grand repas qui se profile avec les cousins du Nôm. Ça risque d’être sympa, mais comme ce sera en plein air, il ne faudra pas qu’il pleuve. Nous, nous devons acheter la boisson. Et puis le papier cadeau et deux trois petits trucs pour les minettes. Lou a fait sa commande au père noël. Elle veut une trottinette (qui n’arrivera que le 11 en même temps qu’une amie qui nous rejoint), un bébé flurby (là, je ne sais pas trop ce que c’est ni comment ça s’écrit et ce sera non), et des CD pour jouer sur l’ordinateur. Ce qui est déjà fait. Donc, on n’est pas trop mal. Pour Garance, j’ai des disques, un bouquin, mais il faut que je trouve un poupée ou un autre petit truc. Quant à Léone, ce sera vraiment pour faire semblant.

Je me suis fait les ongles de pied. Pour moi, ça c’est vraiment le signe de l’été. Et j’ai, bien entendu, les deux aînées qui se sont ramenées les pieds en avant. Les filles, je vous jure. Moi j’ai attendu d’être maman pour me mettre du vernis sur les ongles de pied. Précédemment, je trouvais ça… Je ne sais pas. Maintenant je trouve cela joli. Surtout couleur rouge sombre ou prune. Mais je n’en suis pas encore aux mains. Point trop n’en faut.

Voiture

Hier nous sommes enfin sortis de notre trou, confortable mais trou. La voiture enfin réparée nous l’avons essayée, voir si elle marchait toujours bien. C’est une vieille 205 qui a fait la guerre, comme on dit, mais qui roule et nous transporte. Et ma foi, c’est tout ce qu’on lui demande. Nous avons été faire de l’essence, sortie ô combien palpitante. Puis nous avons été voir un copain du Nôm. Enfin, ses parents, parce que le copain en question est arrivé tard, puis s’est mis dans sa cuisine. Nous l’avons revu au moment de dire au revoir… Parfois, l’amitié m’étonne…

Chanté nwel

Hier soir nous avons été à un chanté nwel (noël en créole bien sûr). Les gens se rassemblent chez l’un ou l’autre. Des musiciens viennent et on chante des cantiques de noël. Les traditionnels. Ceux que tout le monde connaît pour peu qu’il ait un peu fréquenté l’église. Gloria in excelsis deo par exemple, Les anges dans nos campagnes, etc. Mais avec un rythme quelque peu différent. Un peu plus accéléré et chaloupé…. Bref, les cantiques façon zouk.

Les bonnes manières créoles font que ceux qui reçoivent doivent donner à boire et à manger à la compagnie. J’avais déjà dîner (souper), mais j’ai goûté leur boudin et leur rhum qui était ma foi fort bon. Ils servaient quantité de jus aussi. Il y a deux boissons qu’on appelle jus en Guadeloupe : les jus de fruits et les sodas. Ces derniers sont tant appréciés ici qu’on est obligé d’appeler « jus locaux » ceux aux fruits pour les différencier. Le reste c’est Coca Cola bien sûr, mais aussi toute catégorie de soda de toutes les couleurs garantis 100 % pas naturels. Avec des goûts incroyables et extrêmement sucré. Ils servent souvent ça à table. Et franchement, je préfère encore boire de l’eau. Je me bats pour que les filles n’en consomment pas trop. Le syndrome du gamin obèse à force de sucreries, je n’aimerais pas trop.

Hier soir, la plupart de ces messieurs buvaient du rhum. Il y en avait un certain nombre de bien saouls, dont un des beaux-frères de Fritz, qu’on apprécie, mais là vraiment, on avait du mal à comprendre ce qu’il nous racontait. J’aime bien ces soirées (en dehors des ivrognes) parce qu’elles sont bon enfant. Les gens s’amusent, chantent et dansent ensemble. Nous avions emmené Lou qui voulait venir mais qui, parce qu’elle était fatiguée, faisait un tête de six pied cinq pouces. J’ai essayé de lui faire découvrir les harmonies des chanteurs, les gammes des tambours. Mais elle avait un mal de chien à se dérider. Je voyais bien qu’elle se forçait à rire et à danser pour me faire plaisir. Pourtant, avec ces cantiques à la sauce créole, il y avait de quoi se mettre en joie.

En général, l’un des chanteurs ou chanteuses principaux lance un cantique. Les autres suivent. Après le premier refrain, les tambours se mettent de la fête et tout le monde commence à danser. C’est un peu le même principe que le lewoz. Ce dernier étant une soirée musicale traditionnelle, de celles qui se pratiquaient, quand le maître le voulaient bien, du temps de l’esclavage. An tan lontan, comme on dit. Sur certaines plantations, les maîtres interdisaient le tambour, support de pratiques malsaines voire démoniaques disaient-ils. En réalité, ils savaient très bien que le tambour était la seule chose de l’ancienne culture africaine qui restait aux esclaves, ils savaient aussi que les esclaves pouvaient communiquer d’une plantation à l’autre par ce biais.

Bref, les Guadeloupéens, pour remplacer leur tambour inventèrent le boulagel, qui est un roulement de tambour fait avec les voix des chanteurs. Chacun prend son rythme et fait un son. Et sur cette musique là, on chante et on danse aussi.

Les cantiques ont pris donc la mesure des chants traditionnels d’ici. Sauf qu’hier, ce qui était assez drôle, c’est qu’il y avait les croyants d’un côté, les mécréants de l’autre. Les croyants lançaient des cantiques, les autres des chants traditionnels en créole. C’est le premier qui lance le chant qui a raison. A ce rythme là, ce sont les mécréants qui ont gagné. C’est la première fois que je vois ça.

Cadeaux

Ce matin, ma partie était un peu moins marrante. C’était la visite mensuelle de Léone chez le médecin. Elle a passé le cap des 6 kilos. Sacré morceau. Tout le monde me félicite pour mon joli gros bébé… C’est un critère. Mais elle a apparemment une mycose dans les oreilles. Après l’eczéma, la pauvre… Ensuite nous avons été faire nos dernières emplettes pour Noël. Discuté un ti brin avec le père noël. Le Nôm a choisi – pour Garance – un Dipsy (le black de la bande des Teletubbies) qui parle. Ça coûte cher ces trucs-là-là, mais il voulait vraiment cette peluche pour sa doudou. Lou aura une paire de rollers en attendant que sa trottinette arrive. Plus des livres, des CD ROM, des CD audio. Elle va en avoir de paquets. En fait, il faut que je fasse le tri entre ce qu’elle recevra pour Noël, et ce qu’elle aura pour son anniversaire quelques jours plus tard… Enfin, question cadeaux, nous sommes parés. Il n’y a plus qu’à acheter du papier.

le sacrifice du cochon

Cet après-midi, nous avons assisté au sacrifice des cochons. Enfin, nous sommes arrivés au moment du nettoyage, les deux bêtes avaient déjà été tuées.

Les filles ont pu parfaire leur connaissance en anatomie porcine. Garance voulait même donner un coup de main. Mais nous avons réussi à la contenir. Le Nôm est aller chercher des cocos vertes qu’il a ouvertes. Nous avons bu l’eau de coco, en nous en foutant partout comme d’hab, parce que ce n’est pas un exercice si facile. Puis nous avons mangé le début de chair qui s’était formé.

Plus tard, nous avons mâchouillé de la canne à sucre. La canne est un bambou très tendre à l’intérieur, fait de fibres immangeables et de sève, très sucrée (et bonne, bonne, bonne). On s’en coupe donc des petits morceaux que l’on mastique pour en extraire le jus et ensuite on jette le « foin ». Enfin certains jettent, d’autres crachent. Du coup, avec Lou on s’est fait un concours de crachat. A qui lancerait le morceau de canne le plus loin possible. Nous nous sommes marrées comme des baleines toutes les deux. Après, nous étions toutes poisseuses.

Hildevert, le père du Nôm, est agriculteur. Il élève des animaux pour leur viande. Il les tue avec des

amis ou des parents. Chaque aide a droit à un morceau de l’animal. Le reste, il le vend. Il est réputé pour sa viande (et c’est vrai qu’elle est bonne). Mais les hygiénistes, s’il le voyaient, en feraient une apoplexie. C’est plutôt artisanal. Le cochon est nettoyé sur une table qui n’est pas de laboratoire, en plein air, avec ce qu’il faut de mouches. Puis il est suspendu à une branche, il est alors découpé et les morceaux de viandes sont déposés sur les feuilles de bananier. Ce rouge sur ce vert, c’est joli, mais bon… C’est sans doute pour cela que les Antillais (en tout cas ceux de la famille) mangent la viande bien cuite (pas que le porc). 

Le calme après la tempête

Une toute petite grenouille vient de s’installer sur mes enveloppe sur la table de nuit. Elle n’est pas plus grosse que l’ongle de mon petit doigt. Moi je suis sur le lit, sous la moustiquaire. Tout est calme dans la maison, les enfants dorment, le Nôm est sorti. Et c’est bon.

Aksident

Je n’irai pas sur Internet ce soir. Je ne peux pas mobiliser la ligne. La grand-mère a été hospitalisée et on attend des appels de la famille et éventuellement de l’hôpital. Agricultrice, elle s’est donné un méchant coup de fourche dans le pied. La fourche a pénétré profond dans les chairs.

La douleur

Rosélie est rentrée chez elle mais ne va pas très bien. Elle a été emmenée aux urgence qui ne l’ont pas très bien soignée. Surtout en superficie, pas à l’intérieur. Or une fourche, c’est plutôt dégueulasse. Une respectable dame de presque 80 ans. Ce qui devait arriver arriva : le pied s’est infectée et elle souffre le martyr, car, évidemment, les antidouleurs, les médecins ne semblent pas connaître. C’est incroyable ce que l’on soit encore si loin du compte sur la douleur. Il y a deux nuits, elle n’a pu fermer l’œil parce qu’elle avait trop mal. La famille râle, mais personne n’ose aller dire son fait au toubib. C’est pas dans leur culture. Moi je pousserais une de ces gueulantes.

Noël

Ça sent bon la cuisine et les épices. Les repas de noël se préparent tôt. La journée promet d’être longue et gastronomique. Hier, j’ai passé l’après-midi à faire des paquets cadeaux. C’est dire si les enfants vont être gâtées. Lou a vu une partie des présents. Elle qui ne voit jamais rien, il a fallu qu’elle tombe dessus. Si elle croit encore au père noël après ça, c’est qu’elle a vraiment la foi !